Une beauté diffuse : quand l’éclat s’efface dans la brume

Dès les premières notes de Given to the Wild, quelque chose de planant s’installe, une forme d’élan mélancolique qui embrasse l’auditeur et le guide dans un voyage introspectif. C’est un album qui cherche moins à séduire frontalement qu’à envelopper doucement, à imposer une ambiance plutôt qu’à revendiquer une identité nette. Et c’est précisément ce qui fait sa force… et sa limite.


Ce qui frappe d’emblée, c’est l’ampleur sonore que le groupe tente d’atteindre. The Maccabees, jusqu’alors plus enracinés dans une pop indie à la fois nerveuse et mélodique, choisissent ici de s’aventurer vers des territoires plus atmosphériques, parfois même cinématographiques. On pense à des nappes proches de Sigur Rós ou à l’intensité émotionnelle que peut suggérer Foals. La production est soignée, les arrangements élégants, et des morceaux comme Pelican ou Feel to Follow témoignent d’un savoir-faire musical certain.


Mais cette recherche de grandeur, si elle est louable, tend parfois à diluer l’émotion brute. L’album crée une distance, une sorte de voile entre l’intention et la réception. On sent bien que les Maccabees veulent toucher à quelque chose de profond, mais certains titres manquent d’un point d’ancrage, d’un relief suffisant pour vraiment marquer. L’écoute se fait alors plus contemplative que viscérale, agréable mais un peu évanescente. On survole, on plane, mais on ne s’attarde pas forcément.


L’album est homogène, et c’est à la fois sa qualité et son piège. Il se tient, il s’écoute d’une traite, il forme un tout. Mais ce tout manque parfois de contrastes. À trop vouloir rester dans une gamme émotionnelle feutrée, l’ensemble peut sembler linéaire, voire répétitif. J’aurais aimé quelques déchirures, quelques fulgurances inattendues qui viendraient bousculer cette douce torpeur.


Je lui ai mis 7/10, et je m’y tiens. Parce qu’il y a indéniablement du talent, une volonté artistique sincère, et une atmosphère qui mérite d’être ressentie. Mais aussi parce que, malgré cette beauté diffuse, l’album peine parfois à réellement me toucher. C’est une œuvre à laquelle je reviens, mais plus pour me perdre dans son ambiance que pour en savourer chaque morceau individuellement.


En somme, Given to the Wild est un album qui caresse plus qu’il ne secoue, qui séduit par sa grâce mais laisse parfois l’émotion s’évaporer. Une belle errance musicale, douce et floue, à écouter comme on regarde la pluie tomber depuis la fenêtre.

CriticMaster
7
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le 14 avr. 2025

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