Qu'est-ce qu'un "héros" ?
Voici une question qui ressort après la lecture de ce roman-comic. L'ayant découvert après avoir vu le film (très bon au demeurant), je me suis rendu compte que l'adaptation cinématographique n'était jamais qu'une version édulcorée de l'original. Je ne vais pas ici démonter le film, parce ce n'est pas la place pour et que c'est un bon film, traitant bien de son sujet.
Exit les conspirations, les partis extrémistes gagnant des élections, les individus éprouvant des remords et les amis de la liberté, et plongez-vous dans un univers dur, sombre et sans concession où un anarchiste nihiliste et sans scrupules veut mettre à bas un régime non pas "juste" autoritaire mais fasciste, totalitaire, lui aussi sans concession.
Tout commence par la rencontre de l'anarchiste masqué et de la jeune Evey, non plus assistante dans un studio télé, mais gamine de seize ans travaillant en usine cherchant à se prostituer pour gagner un peu d'argent, sur le point de se faire tuer (et sans doute avant violer) par des agents du Doigt, police secrète de cette Angleterre fasciste.
Ici, point d'histoire d'amour, mais plus une relation de mentor à apprenti, ou ce dernier se retrouve parfois gibier pour attirer les loups vers le chasseur. En effet, V n'est pas (ou plus) une personne à proprement parler : rien ne se cache derrière ce masque qu'une chair brûlée, motivée par la vengeance et sans doute par la haine. Personne ne peut dire si V agit par seul philanthropie anarchiste ou ou par vengeance personnelle contre ceux qui l'ont brisé.
Autre point marquant : la franchise des dépositaires des deux extrêmes. J'aimerais ici me pencher sur le discours du leader du "Norsefire" (parti fasciste au pouvoir) : Susan Adam. Ancien policier, il profite du chaos ayant sévit en Angleterre pour créer son mouvement et prendre le pouvoir. Misogyne, homophobe, raciste et ne soutenant que le christianisme, il se revendique ouvertement fasciste et se justifie en expliquant pourquoi ce serait le meilleur mode de gouvernement, pour guider les Anglais, les dirigeant par la force et la peur, contrôlant leur existence, au travers de plusieurs organismes étatiques. A défaut de l'apprécier, tant humainement que politiquement qu'éthiquement, je le considère comme un personnage "respectable" ou du moins comme étant l'égal de V, tous deux étant compris comme les deux facette de la destruction et du nihilisme. Loin de nous l'image du dictateur qui crie fort et tape sur la table quand il fait des crises de colère. Cet homme croit , sait qu'il n'est pas aimé mais ira vers ce qui lui semble juste.
Voici qui peut conclure cette critique : si V est un héros, que peut être Susan Adam ? Un héros ? Non, certainement pas comme on l'entend. Mais V, pourquoi serait-il plus un héros que Adam ? Ils ont tant en commun, sauf la coloration... ce roman-graphique remet en question les notions de bien et de mal, et même si on est pour la plupart tous pour soutenir V (au moins par défaut) et rejeter Adam, et que si on considère qu'Adam n'a pas volé son sort, on se rend compte que V aussi, au nom de ses principes, agit en ne tenant pas compte des autres opinions que la sienne.
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