Première partie très réussie, où le côté esthétisant de la réalisation de Mendes sert l'implication du spectateur. La traversée du No Man's Land et la séquence du bunker sont particulièrement réussies dans leur mise en scène de la paranoïa des personnages, de la pénibilité physique et psychologique de leur progression.


A partir du moment où le duo se change en solo, tout fout le camp et c'est la fête au Pompier. Cohérence aux fraises pour les bienfaits d'une pyrotechnie boursoufflée, BO épique à 1000 décibels ; ce ne sont plus deux troufions auxquels chacun peut s'identifier, c'est James Bond.


Je soulignerais en outre que l'excessif pacifisme des deux personnages (y compris d'un gars qui est censé avoir été médaillé de la Somme - était-ce pour distribution de biscuits maison aux Allemands ?) finit par avoir raison de toute cohérence en tentant - j'imagine - de les rendre à tout prix sympathiques aux yeux du spectateur moderne. L'effet est, en plus, contre-productif dans sa tentative de peinture des horreurs de la guerre : au final, ce n'est plus "la guerre oblige les gens ordinaires à faire des choses terribles pour survivre", c'est "Bisounours 1 et Bisounours 2, pauvres choux face aux méchants qui les attaquent alors que eux ne demandent qu'à embrasser l'Humanité avec leurs petits bras roses et moelleux". Ce refus de l’ambiguïté morale semble un peu puéril au vu des horreurs que le film ne se gêne guère pour montrer par ailleurs.


Pour résumer, très bonne première moitié de film, qui m'a agréablement surprise et à laquelle j'aurais collé un 8 sans rechigner. Très grosse déception ensuite : Mendes a fait du film ce que je craignais qu'il n'en fasse dès le départ. Le sujet méritait pourtant mieux que "Daniel Craig dans les tranchées".

LaurèneBancale
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le 24 févr. 2020

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