28 ans plus tard
6.3
28 ans plus tard

Film de Danny Boyle (2025)

A ce stade, tout a déjà été dit sur le film, je ne ferai donc que trancher mon avis en formulant cette simple petite synthèse. Nous sommes bel et bien en face d'un film malade, qui diverge entre plusieurs objectifs narratifs plus ou moins éclatés et qui les monte avec une notion du découpage qui rendrait fou Uwe Boll. Ca part dans plusieurs directions, la cohérence en prend parfois un coup, mais on sent aussi une touche Alex Garland™ dans l'esthétique qui n'est pas toujours désagréable, nous rappelant les meilleurs moments de son Annihilation. Maintenant que cette intro sans intro commence à s'éclater comme le film, commençons à aller dans le détail.


Sur la forme, le bilan est mitigé. Il s'agit nettement du film de la saga qui a les ambiances visuelles les plus abouties et les plus esthétiques. Les séquences contemplatives sont souvent un régal et quand la musique s'y prête (et il faudra qu'on parle de la musique), on a quelques moments de poésie qui peuvent un peu aller vers les objectifs initiatiques visés par le film. Ces rares moments sont réussis, et certaines esthétiques de nuit ou de couleurs pastels donnent un petit cachet au film. Pour la musique, on lance une pièce à chaque nouvelle séquence. Pile, on essaye de faire un truc à peu près raccord, face c'est Yolo, on fait n'importe quoi en espérant que les gens prendront ça pour du style. Quant au montage du film, faudrait pas que les gens croient que "punk" veut dire découpé n'importe comment façon Godard. Si un montage très rapide peut instaurer de la tension, encore faut-il qu'il soit lisible et logique (abominable première séquence dans la maison qui ruine déjà les espoirs d'avoir une efficacité à l'égal des deux prédécesseurs). Mais ce sont les inserts hors sujet réguliers qui agacent, comme des tics de montage qui n'auraient aucun intérêt dans la narration du film. A ce niveau, l'utilisation de la planche avec les 40 I-phones utilisée pendant les séquences d'action est un flop magistral, que le film a tout de même gardé sous la forme d'un cut brutal à 130° lors de chaque mise à mort des premiers infectés. Puis ils ont dû se rendre compte de la boulette et de l'inexploitabilité des images et ont abandonné l'idée, autant ne plus s'embêter et filmer normalement. Le pétard mouillé...


C'est là dessus que je veux finalement insister. Danny Boyle a beau avoir son style particulier et revendiquer de faire encore des plans dynamiques ou des cadrages improbables (façon punk anglais quoi), ses précédents films ne contenaient pas autant d'erreurs. Et il me semble que ce montage agressif et lunatique, qui ne fait pas d'efforts pour atténuer ses problèmes, est davantage une démission qu'un parti pris artistique. Boyle a voulu tout réinventer avec ce projet et le résultat n'est pas bien ouf, à la limite de l'exploitable. Il y a quand même eu du traitement en post prod pour rajouter nombre d'effets spéciaux ou booster l'esthétique, mais ça ne rattrape pas les lacunes du scénario et certaines aberrations.


C'est maintenant qu'on parle du fond. Alex Garland...Wokisme...Gnagnagna... Bon, l'idée des contaminés à poil, c'est une idée qui avait été abandonnée sur le premier 28 jours plus tard, et qui a été ressortie du placard par Alex Garland pour faire un raccord avec un de ses autres films : Men. Film dont le propos misandre m'avait un peu braqué, et qu'on retrouve dilué ici en toile de fond avec un choix Mère/Père 100% biaisé, avec la mort du père symboliquement (le rejet de la présence du père) puis physiquement (en la personne de l'alpha), et une idolâtrie pour la Mère et sa sensibilité dans ce monde en perdition. C'est manichéen et pas très à propos. Mais c'est moins insultant que Men. A quelques séquences près comme cette hallucinante séquence d'accouchement qui défie toutes les règles de l'univers de la saga pour livrer un "symbole fort" sur la sororité et la pulsion matriarcale. Dommage que ce genre de passage fasse immédiatement sortir du film en gâchant les quelques moments qu'on avait apprécié. Je voulais passer un long moment d'analyse sur les b1tes des contaminés que le films prend toujours un malin plaisir à mettre en avant, à inclure dans le cadre, ect... Surtout celle de l'Alpha, monstrueuse, veineuse, d'un calibre à faire dégriser Pierre Palmade, symbole marquant de la masculinité brutale et nocive. Et on s'arrêtera là dessus plutôt que d'insister sur le voyeurisme teinté d'une pointe de progressisme lgbt, belle évolution de notre cinéma moderne.


Et ce final... Ce final... Ca faisait longtemps que je n'avais pas vu un truc aussi absurde. Passer de Annihilation à Turbokid sans transition, attention à la fissure anale ! On aurait pu croire à une blague si cela n'avait pas atterri dans le montage final. Terminer dans le ridicule un projet qui sentait déjà un peu le sapin, tout en nous promettant une suite qui va encore nous amener dans d'autres terrains inconnus, ça y est, ce frissonnement, cette sueur qui perle, ce ventre qui gargouille... On avait oublié cette émotion, et elle revient...

C'est la chiasse.

28 rouleaux plus tard...

Voracinéphile
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le 24 juin 2025

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Voracinéphile

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