Voilà le petit chef-d’œuvre de Jan, qui ne m’avait pas habitué à pareille fête. Inspiré du bouquin du même nom, le bouquin disparaît vite. C’est un canevas sur lequel Jan brode, et délire un max, avec l’accord, (et l’apparition) de l’auteur. Cameo par ci, par là, entre deux lignes de coke. Placement de produit numéro 1, la coke. Il a fallut 10 kilos de cocaïne pour penser, engager, et terminer ce film. Sans coke, il n’aurait aucune raison d’exister, qu’on se le dise. Le résultat est trippant.
Octave est fils de pub. Il bosse à la Ross & Witchcraft, célèbre agence de putes. Il décide de ce qu’on va manger, boire, porter, acheter, la couleur de notre salle à manger, c’est lui. Il décide de tout. La mode, c’est lui qui l’a crée. Il pond les meilleures campagnes, et est payé pour, (assez cher). Pour lui, « l’homme est un produit comme un autre », c’est la routine.
J’ai adoré le trip. L’idée, sa réalisation. Trip barré. Je n’y ai vu aucune critique réelle du monde de la pub, plutôt une glorification. La glorification absolue du système à coup de virtuosité formelle, d’invention à la chaîne, de dizaine d’idées par plan à la minute. Au bout d’une heure on ne sait plus où on habite, (peut-être à cause de la coke).
Jan fait du placement de produit. Son produit vedette, (en plus de la poudre) ce n’est pas Beigbeder, ni 99 F, mais l’acteur Jean Dujardin qui a un rôle en or pour exprimer tout son talent. Il en profite pour briller dans les grandes largeurs. Quel acteur ! On est loin de : Un gars, une fille. Très loin. On pense que c’est écrit, mais on a l’impression qu’il improvise tout le champ. Il apporte un second degré salvateur, coincé entre un narcissisme désespéré qui donne du fond, et évite de tomber dans le complet burlesque voire le ridicule. Bien aidé par son minion, (Jocelyn Quivrin excellent), voilà nos deux zouaves qui foutent le boxon, entre deux lignes de coke et un joint; ils pondent une idée géniale qui va sauver la prochaine campagne de pub et la saison de la boîte, et la boîte elle-même. Qu’est-ce qu’on ferait sans eux, hein ? Se sont deux artistes. Oui.... mais non.
Soudain, Octave pète les plombs. TROP de coke, d’argent, de luxe, de filles; l’ennui. Octave c’est une belle grosse merde, il suffisait de le reconnaître. Il vend de la merde. L’artiste enfermé dans sa cage dorée se rebelle, et décide de tout foutre en l’air ; Octave c’est Jan Kounen bien sûr. Il crache dans la soupe, et alors ? Étant lui-même fils de pub, il sait de quoi il parle quand il cause des putes, des rapaces et tout ça. Ceux qui sont payés une blinde pour nous pousser à acheter de la merde ils les connaît, c’est ses anciens potes. Là où il faut appuyer pour que ça fasse mal, il sait. Il sait tourner le jargon (ridicule) des créateurs de pub en ridicule. Il sait décrypter les rouages, les rendre avec simplicité et inventivité. On comprend tout. Mieux, on rit. Si ce n’était pas aussi drôle, on pourrait lui reprocher sa « critique ». Moquerie, je dirais.
Et pour preuve la fin, (les 2 fins) du film, entérinent l’échec cuisant d’Octave. L’agent du système échoue à faire sauter le système trop GROS pour lui. Il n’est qu’un rouage, il le savait depuis le début. Pourquoi a-t’il quand même essayé ? Un moment d’égarement, peut-être. Trop de coke, sans doute. La drogue, c’est de la merde. Un pote infirmier me disait qu’avec ce genre de merde, au bout d’un moment, ton cerveau il commence à se liquéfier. Tu ne contrôles plus rien. "Surtout ne touche pas à ça!" avait-il ajouté. "La drogue c'est de la merde."
Á beau vouloir enrayer une machine très bien huilée, elle ne s’enraye jamais, et toi tu tournes. En rond comme un hamster dans sa cage MADE IN CHINA, à la recherche du salut, qui ne vient pas. Critique s’il y a, elle est acerbe, crachée. Pamphlet trash, parodie du Fight Club, notre personnage principal n’est pas Tyler Durden. Il est trop narcissique pour tomber dans la schizophrénie. Il veut qu’on l’aime, et s’y prend mal.
1 cameo, 2 cameos, 3 camés plus tard, on se retrouve en cure, à l’asile. Beigbeder/Kounen/Dujardin dans le même pyjama, à l’ombre. La fusion des 3 zozos donne un personnage inattendu : Pyjaman. Super héros pathétique et complètement à l’Ouest. Pyjaman qui a la solution pour s’en sortir. Partir. Loin. Sur une île déserte. Mais…
Coup de force de Kounen, s’effacer derrière Dujardin et ne pas le brider. Et là, on s’envole. Du grand art. Punchlines en pagaille. Audace, provoc, cul, tout pour faire culte. On adore, ou on n’aime pas. Pas de juste milieu. C’est du Kounen. En tout cas, ça brille comme un sou neuf ! La meilleure comédie française des temps présents et à venir.
PS : Pour ceux qui n’aiment pas Beigbeder, et qui hésitent à voir le film, je vous comprends. Mais oubliez-le deux minutes. C’est vrai qu’il peut être énervant, mais on le voit si peu. Une demi-seconde. Rien. Image subliminale dans un miroir, vite passée.
La cocaïne est un [PUISSANT] alcaloïde, extrait de la feuille de coca.
Produit festif à apprécier, et consommer avec modération.
Pour les : Bar-mitsvas, mariages, anniversaires, pendaison de crémaillère, baptêmes…
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