Cette fresque esthétique sur l’évolution sociologique de la Chine et ses habitants suit les pérégrinations de trois générations d'une famille, vivant au rythme des saisons, le long d'un fleuve, dans les Monts Fuchun. Temporalités des saisons, des retrouvailles familiales, méditation sur le temps, le film se déploie sur quatre saisons, le fleuve change, les arbres se fondent dans les couleurs de l’été et de l’hiver, tout évolue, la composition de la tribu et surtout la ville qui subit son lot de destructions et de reconstructions. Film/peinture dans la forme, le film de Gu Xiao-gang est un vaste récit qui raconte des histoires d'amour, d'amitié, de trahison, mais aussi les mutations de la société chinoise, de la ville chinoise, de la famille chinoise. Faisant preuve d'un souffle narratif et d'une élégance de réalisation rares pour un premier film, son esthétique singulière s'inspire de l'art pictural classique en Chine. L'utilisation de longs travellings latéraux rappelle la manière dont l'œil parcourt les rouleaux horizontaux de peinture traditionnelle chinoise, dont un exemple célèbre peint au XIVe siècle donne son titre au film. Le cinéaste manie la “caméra pinceau” en plans-séquence virtuoses et élégants ou en plans larges où les personnages apparaissent ou disparaissent derrière un arbre ou la végétation grâce à un jeu sur le plein et le vide. Un splendide premier film à la maîtrise impressionnante qui donne envie de suivre les prochaines oeuvres de ce jeune réalisateur, puisqu’il annonce dans un carton final que ce film est le premier d’une trilogie