A couteaux tirés fait revivre un genre que l'on pensait engoncé dans sa poussière et devenu ringard depuis longtemps : l'enquête à huis clos, ou ce qu'on appel communément le "Cluedo géant". C'était sans compter Rian Jonhson, qui décide de changer du tout au tout en passant de la SF pour l'épisode VIII de Star Wars, à ça. Et je le maintiens, Les Derniers Jedi est un bon SW. pas dénué de défauts ( trop long), mais bon tout de même. Mais comme ce n'est pas le sujet, je ne vais pas m'étendre dessus. Rangez vos couteaux, merci. Mais qu'est-ce que je me sens seul, parfois...
Bref, de couteaux, il en est question dans ce film, et pas que dans le titre, qui respecte l'original (Knives Out en anglais). Le patriarche de la famille Thrombey, Harlan, écrivain à succès et directeur d'une maison d'édition, est retrouvé mort, le lendemain de la fête de ses 85 ans. Tout semble accréditer la thèse du suicide, mais les apparences ne sont pas si simples... Par conséquent, toute la famille Thrombey se retrouve convoquée par la police, ainsi que le personnel de maison.
On apprend petit à petit ce qui s'est passé lors de cette soirée. Johnson n'épargne personne, et surtout pas la bonne bourgeoisie américaine, le milieu d'où réside la famille. Et cela va du nazillon petit con (pléonasme) dénonçant des réfugiés, en passant par la hipster végano-zen, à la gauchiste pure et dure. Tous avaient de bonnes raisons d'en vouloir au vieux, qui s'est rendu compte de certaines choses, et décidé d'y mettre un terme. Qui dit la vérité et qui ment ?
Mais le réalisateur n'épargne pas non plus le spectateur, car il réussit le tour de force d'avoir fait un Cluedo géant, mais surtout très malin. Toutes les certitudes ouvertes par une séquence sont balayées dans le quart d'heure d'après avec la venue de nouveaux éléments. Et petit à petit, on finit par reconstituer une bonne partie du déroulement de la soirée.
Une enquête qui est menée par le détective Benoit Blanc, interprété par un grand Daniel Craig.
L'ingéniosité de Johnson vient aussi dans l'utilisation de certains éléments et le fait qu'il place l'époque de l'action dans la période contemporaine, l'utilisation des réseaux, des médias et smartphones en témoigne. Sans compter les sujets d'actualité brûlante outre-Atlantique, qui déchire la bonne petite famille bourgeoise, et dont tous espèrent secrètement toucher une part de l'héritage du padre.
Pour le lieu, c'est toujours une vieille bâtisse du style manoir, symbole d'une bourgeoisie américaine engluée dans ses certitudes.
Le tout doit aussi à l'abattage fourni par les acteurs , outre Craig, déjà cité en inspecteur impayable, on retrouve Jamie Lee Curtis ( méconnaissable, il faut bien le dire), Chris Evans, qui campe un personnage plus complexe qu'il n'y parait, Don Johnson, Michael Shannon ou encore Toni Colette... Un casting de premier choix. Et ce sans compter Ana de Armas, impeccable en petite infirmière personnelle du patriarche assez ingénue.
Coté réalisation, nous avons affaire avec un film qui signe son esthétisme à chaque plan, et une bonne utilisation de l'espace disponible dans le manoir.
Une bonne petite surprise que ce film, mais qui n'est pas sans défauts : le début est peu clair et la fin s'éternise et est de surcroît un peu trop explicative. Pour le reste, c'est un bon petit polar bien ficelé dans l'ensemble. Et aussi une histoire de famille...