Dans All Is Bright, Phil Morrison signe une comédie dramatique à contre-courant des récits traditionnels de Noël. Il nous plonge dans le quotidien gris et glacé de deux marginaux : Dennis (Paul Giamatti), un ex-taulard amer à la recherche d'une rédemption incertaine, et René (Paul Rudd), ami de longue date devenu traître malgré lui. À travers ce duo bancal, le film tente de raconter une amitié brisée, un hiver moral, et la quête presque absurde d’un second souffle.
Dennis est sans doute le personnage le plus abouti du film. À la fois rugueux et vulnérable, il incarne ce type d’homme usé, broyé par ses erreurs passées, mais encore habité par un reste d’espoir. Son obsession pour offrir un piano à sa fille – qu’il n’a plus le droit de voir – agit comme un moteur mélancolique. Ce n’est pas tant le piano que l’idée de redevenir, même fugacement, un père digne de ce nom. Paul Giamatti excelle ici : ses silences, ses regards lourds, son langage corporel parlent autant que ses répliques. Il réussit à rendre Dennis profondément humain, même dans ses moments de mesquinerie.
Face à lui, René est traité de manière plus superficielle. Il est le complice devenu obstacle, l’ami qui a pris la place de Dennis dans sa propre famille. Paul Rudd, qu’on connaît pour ses rôles plus lumineux, semble ici sous-écrit. Son personnage peine à exister au-delà du rôle de faire-valoir, parfois même d’alibi comique. Pourtant, René aurait pu être fascinant : c’est un homme qui, malgré une trahison évidente, n’est pas fondamentalement mauvais. Il est simplement lâche, pragmatique, un peu perdu lui aussi. Mais le film ne lui donne pas assez d’épaisseur pour que son dilemme intérieur résonne vraiment.
La dynamique entre les deux hommes, censée porter le cœur du récit, reste inégale. Si quelques scènes laissent entrevoir une vraie complicité passée – et une rancœur profonde –, l’évolution de leur relation manque de tension dramatique. Leur réconciliation, leur entêtement mutuel, tout cela reste trop en surface pour pleinement émouvoir. On aurait aimé que le film aille plus loin, explore davantage la complexité de leur lien, les zones grises entre loyauté, jalousie, culpabilité et besoin d’amour.
Ce déséquilibre dans le traitement des personnages contribue sans doute au sentiment d’inabouti que laisse le film. Pourtant, à travers Dennis, Morrison parvient à capter quelque chose de précieux : la solitude d’un homme que la société a mis sur pause, mais qui continue à avancer, à sa manière, malgré le froid, la fatigue, et l’indifférence du monde.