Je ne comprendrai jamais ces auteurs qui ont une idée principale assez chouette, mais qui la sacrifient sur l'autel du twist. Un twist, c'est un revirement soudain, qui fait poser des questions sur tout ce qu'on a vu. Par conséquent, pour que le twist soit efficace, ce que l'on a vu doit être simple et marquant, mais certainement pas développé. Et donc, cette idée de se retrouver dans un lieu de reconstitution où les acteurs sont des gens un peu fous et certainement très racistes, ben on en profite pas.
L'arrivée de la belle écrivaine un peu hautaine dans ce campement, son impression face à cette folie, on ne la vit pas, pourtant c'était nécessaire pour s'identifier au personnage. Au lieu d eça, on commence le film avec l'arrivée d'une jeune femme qui a l'air un peu paumée mais dont les protestation et autres interrogations sont, de façon peu crédibles, assez faibles. Forcément sur le moment ça ne choque pas. Quand on revoit la scène après avoir su, on se dit juste que c'est pas possible de si bien prendre la chose.
C'est d'autant plus dommage qu'on imagine tout un film basé sur la découverte de cet endroit nostalgique, avec l'héroïne qui apprend les règles malgré elle, mais aussi qui doit apprendre à la fermer, elle qui était à la base une militante qui n'avait pas peur de l'ouvrir bien grande. Mais tout ça on ne le verra pas. Exit la découverte de cet univers violent et anti-humaniste, comme on le ferait d'une planète dans un film de sci-fi.
Non, vraiment, les auteurs ont cassé leur propre concept.
Le pire dans tout ça, c'est que ce n'est même pas très inspiré. Comme si faire de la reconstitution suffisait en soi pour faire du spectacle, sauf que non, ce début, avec les esclaves qui se font brutaliser, c'est assez faible, même pas du déjà-vu tant ça manque d'originalité. De temps en temps une bonne idée ressort, mais son développement est faible, comme celui des personnages.
Pour découvrir qui est cette Veronica/Eden, il faudra se contenter de ce flashback d'une demi-heure, sinon en dehors de ça, nous ne découvrirons que maladroitement sa personnalité, sa caractérisation. Il en va ainsi pour les autres personnages noirs. Les personnages blancs sont finalement les plus 'développés', même s'il s'agit de caricature, de méchants 'très méchants'. Mais sont-ils vraiment très méchants ? Pas tant que ça, ils aboient beaucoup mais leur cruauté n'est finalement pas très poussée et en effet, cette reconstitution passe pour un paradis par rapport à ce que pouvait être, probablement certaines plantations il y a 200 ans (sans généraliser non plus, comme on a pu le constater dans "Autant en emporte le vent").
Notons également ce jeu de passé-présent : on commence dans le présent mais la reconstitution laisse penser que c'est le passé ; quand on passe à la période contemporaine, on est en fait dans le passé. Les dialogues, en plus de la citation au début du film, insistent bien sur le moment présent, le passé, hier, aujourd'hui... c'est un peu lourd en fait.
J'apprends que les deux réalisateurs n'avaient réalisé jusque là que des courts-métrages, dont des clips vidéos. Ceci explique sans doute ces séquences au ralenti avec une musique dramatique. Procédé esthétique pas déplaisant mais qui au final n'apporte pas grand chose. C'est joli, avec un long plan séquence d'ouverture bien orchestré, mais ça ne va pas assez loin. Le découpage est heureusement lisible et le montage bien rythmé. Les acteurs font le boulot. Par contre j'avoue avoir été perturbé : l'actrice principale est méconnaissable sans sa tonne de maquillage. J'ai donc eu des soucis pour l'identifier. La BO est correcte.
Difficile de ne pas penser aux événements récents. En Belgique il y a eu un tollé avec une statue du roi Leopold 2 remplacée par une autre sculpture ; quand l'héroïne se trouve face à la statue du général Lee, j'ai directement pensé à ça. Perso, je ne suis pas pour le déboulonnage de statues ou la censure de films (notons qu'une des intentions des auteurs étaient de rectifier/corriger "autant en emporte le vent", dans leur délire ils ont d'ailleurs décidé d'utiliser les mêmes lentilles que le chef op de Flemming - et Cukor). Pour moi une explication suffit : autant éduquer les gens correctement, en leur expliquant ce qui est bien mais aussi ce qui n'est pas bien plutôt que de distiller uniquement des choses positives dans le monde. Si vraiment il fallait réagir face à une statue de ce genre, et bien plutôt que de mettre aux oubliettes l'œuvre d'un artiste, il suffisait de 'répondre' à cette œuvre avec une œuvre installée à proximité. Quant aux textes introductifs devant "Autant en emporte le vent" et Cie, vu que ça concerne surtout des vieux films... faut il vraiment faire ce genre de précision ? En général, les gens qui regarde des vieux films comme ça sont des cinéphiles, des gens qui aiment bien creuser l'histoire et qui comprennent que des allures racistes appartiennent surtout à une époque. M'enin, je préfère ça à la coupe de plans, de séquences, voire d'épisodes entiers pour des séries, juste parce qu'un personnage a adopté la black face.
Et vous connaissez la meilleure ? Justin Bieber vient de publier une photo de lui avec des dreads et il semblerait que beaucoup de ses fans soient fâchés car c'est une réappropriation culturelle (apparemment iol l'avait déjà fait une fois auparavant et avait reçu les mêmes commentaires). Et oui, apparemment, d'après ces gens, seuls les noirs peuvent porter des dreads. J'imagine donc que ces gens là ne mangent pas de repas italien, ne roule pas dans des voitures allemandes, ne portent pas de montre suisse et tout le tralala ? Où leur bêtise ne se limite qu'à leurs caprices de décérébrés ? Justin a juste répondu : ce ne sont que des cheveux. Et pour une fois, il a bien raison.