Avec Ma part du gâteau et Ni pour ni contre bien au contraire, Ce qui nous lie est un film qui sort des sentiers de l'univers Klapisch. Sa grande originalité est que le réalisateur s'efforce à filmer les grandes espaces de la vigne bourguignonne en en faisant un personnage à part entière. Le domaine viticole qui unit aussi deux frères et une soeur (Jean,Jérémie et Juliette) est comme un rappel aux sources pour cette fratrie qui s'était perdue de vue depuis le départ de l'un d'entre eux et les décès successifs de leurs parents. A partir de là, tout ce petit monde va devoir retrouver ses marques pour cohabiter dans la maison familiale et faire de bons choix de vie. Cela ne se faisant pas sans heurs, certains moments sont délicats mais d'autres sont plein d'émotions et drôles.
Comment Cédric Klapisch arrive donc à nous surprendre? En filmant une histoire universelle avec une famille qui doit se réinventer tout en n'oubliant pas qui elle est. En choisissant des points de vue multiples pour ne pas caricaturer ses personnages ou les rendre trop inconsistants. Ayant participé à des vendanges ou à des paulées ( repas arrosés de fin de récoltes), je trouve que ces scènes sont vraiment authentiques, fidèlement restituées. Cédric Klapisch a aussi décidé de ne pas filmer que du drame mais vraiment de bons moments de partage, des coups de gueule, des rires ( scènes de doublages improvisées des frangins pendant la paulée de leur domaine ou la réception chez Anselme). C'est aussi sa volonté de montrer que dans une famille, rien n'est obligatoirement tout noir ou tout blanc. On peut s'aimer, s'engueuler, ne pas se comprendre mais trouver des moments de clarté purificateurs.
Ce qui est au coeur de l'intrigue, c'est la question doit-on transmettre ou s'enrichir? Ce dilemme surgit surtout chez le personnage de Jean dont les choix personnels l'ont poussé à voyager et à se réaliser aux antipodes. Sa position rend les choses plus complexes et le fait que les affaires financières et familiales se règlent à la fin de l'histoire rappellent que la maturation est nécessaire comme pour un bon vin. En rappelant cette parabole assez simple, Cédric Klapisch met à portée Ce qui nous lie au plus grand nombre et en plus en évitant tout moralisme déplacé. Par cette posture, le réalisateur commet un film populaire, honnête et bienfaisant. Son manque d'exposition sur le circuit promotionnel a sans doute catalogué Ce qui nous lie comme un film secondaire en termes d'évocations. Ce n'est bien évidemment pas le cas et je vous conseille d'aller le réaliser rapidement par vous-même. Cela fait vraiment du bien d'aller voir un film bien fait, généreux et bien interprété. Cette patine à l"ancienne" qu'on aurait trop tendance à dédaigner est pourtant essentielle.

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le 20 juin 2017

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