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C’est un film lourd d’air et de béton, un film où Paris ressemble à une carcasse métallique vidée de son âme. Chien 51 ne parle pas d’un futur : il parle de maintenant, de ce vertige qu’on ressent quand la machine devient la conscience collective et que les humains, eux, n’ont plus grand-chose à dire. Cédric Jimenez filme une ville à trois vitesses, un monde fendu net par la logique de la classe et du contrôle. Zone 1, zone 2, zone 3 — comme des cercles de l’enfer numérique. À mesure que les drones passent dans le ciel, on se demande : qui regarde qui, désormais ? L’homme sur la machine, ou la machine sur l’homme ? Zem (Gilles Lellouche) avance dans cette ville étrangère avec la raideur d’un corps qu’on n’écoute plus. Il a l’air de ces flics qui n’espèrent plus rien mais continuent, par habitude, par fatigue, par instinct. En face, Salia (Adèle Exarchopoulos) est sa contrepartie : vive, tranchante, presque trop lucide. Entre eux, une tension douce, comme un vieux courant d’électricité qu’on n’a pas su couper. Jimenez, lui, regarde tout cela avec une sorte de lucidité glacée. Son film n’a pas la rage de BAC Nord, ni la démesure du thriller américain : il choisit le silence, la lenteur, la densité. Le décor devient presque un personnage — un Paris coupé en trois zones, filtré par des vitres, saturé d’écrans. Tout y semble sous contrôle, sauf la mort, celle du créateur d’ALMA, cette intelligence artificielle qui voulait rendre la justice parfaite. Mais dans Chien 51, la perfection est la vraie menace. Le film n’est pas un pamphlet, ni même une critique politique : c’est une impression. Celle d’un monde où la rationalité a tout pris — la peur, la colère, même l’amour. Et pourtant, quelque chose résiste. Dans un plan où Lellouche regarde la ville depuis un toit, dans un geste de Salia qui frôle la main d’un suspect, dans le bruit sourd d’une respiration sous les néons. Ces micro-battements d’humanité, Jimenez les filme avec une tendresse rare. Oui, le scénario est parfois raide, un peu démonstratif. Oui, le symbolisme appuie là où on avait déjà compris. Mais le film reste habité. Par son ambiance, par son inquiétude, par cette question obsédante : à quoi ressemblera la justice, quand elle n’aura plus de visage ? Chien 51 laisse un goût de fer et de pluie. Un film gris, lent, imparfait — mais hanté, dans le meilleur sens du mot. Note : 10 / 20
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