Parler de l’intelligence artificielle dans un film est évidemment une excellente idée, surtout à une époque où nos sociétés connaissent l’essor fulgurant de ces nouveaux outils qui transforment déjà notre quotidien. Ce film de science-fiction, qui rappelle par certains aspects Her de Spike Jonze avec Joaquin Phoenix, s’empare de ce thème brûlant en explorant l’hyperprésence des objets connectés et la relation troublante que nous entretenons avec eux.
Nous suivons Clarissa, une jeune romancière enfermée dans une « maison d’écriture » ultra-connectée, où chaque geste est observé, chaque mot enregistré. Très vite, le spectateur partage avec elle cette sensation d’étouffement. Les murs bardés de caméras, les voix artificielles omniprésentes et la collecte continue de données créent un climat oppressant. Le film soulève alors, sans jamais apporter de réponses définitives, de nombreuses questions essentielles : jusqu’où sommes-nous prêts à livrer notre intimité à une IA ? Qu’advient-il de la rétention de nos données ? Peut-on encore échapper à une observation constante quand la technologie s’invite jusque dans nos espaces les plus privés ?
La peur de Clarissa est tangible, sincère, et trouve un écho très actuel dans les inquiétudes de notre époque. À travers elle, le film parvient à rendre palpable cette ambiguïté fondamentale : le futur et ses innovations fascinent autant qu’ils effraient. Car si l’intelligence artificielle ouvre des perspectives incroyables — des assistants conversationnels toujours plus performants, capables de fournir en un instant ce qu’autrefois il fallait rechercher longuement — elle impose aussi un rapport de dépendance et d’abandon de soi qui questionne profondément notre liberté.
Sur le plan cinématographique, le film captive par son atmosphère claustrophobe et son suspense constant. On ne s’y ennuie jamais, et l’angoisse psychologique prend le pas sur les effets spectaculaires. L’approche intimiste, centrée sur le ressenti de l’héroïne, rend l’expérience d’autant plus déroutante et marquante.
En somme, c’est une œuvre à la fois inquiétante et stimulante, qui ne se contente pas d’agiter l’épouvantail d’une technologie menaçante, mais qui interroge en profondeur notre rapport à l’IA et au monde connecté. Un film qui laisse une trace, autant par les frissons qu’il procure que par les réflexions qu’il suscite une fois les lumières rallumées.