Par ici la sortie ?
Juste après En Boucle et sa... boucle temporelle aux allures un brin feelgood, voici venir Exit 8 proposant quant à lui, a priori, une infernale boucle spatiale.Si ça, ce n'est pas une...
le 4 sept. 2025
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Parmi les grands mystères, comme qu'y a t'il après la mort ? Sommes nous seuls dans l'univers ? Pourquoi les chaussettes disparaissent dans les laves linges ? Il y a pour moi les jeux vidéos. Je dois avoir une déficience quelque part dans mes connexions neuronales, mais pour moi, la maîtrise d'une manette de console de jeux relève de l'impossibilité physiologique. Les rares fois où il m'est arrivé avec des potes de, par exemple disputer sur une de ces machines un match de football, un "mortal kombat" ou tout autre activité vidéoludique, j'ai été dans l'incapacité de coordonner mes actions sur ladite manette avec ce que je voulais faire, ce que le jeu attendait de moi et le résultat. Je suis ce genre de personne qui appuie frénétiquement sur toutes les touches en accompagnant de grands mouvements aux limites de la normalité l'avatar que je suis sensé incarné, persuadé que ça influera sur le résultat. J'ai donc développé un intérêt pour cette culture proche du néant et tout ça pour dire que l'argument du film adapté d'un de ces jeux m'indiffère totalement.
Je ne saurais même pas évaluer les réussites ou les échecs de telles adaptations par rapport à leur médium d'origine, par contre je peux parfaitement juger des qualités d'un film en l'abordant comme une œuvre culturelle à part entière.
C'est donc ainsi que je vais aborder "Exit 8" et c'est donc ainsi que je vous demande de recevoir cette critique, comme un commentaire sur l'objet film et non comme une évaluation de sa pertinence ou de son respect ou de quelque autre facteur qui viendrait du jeu dont il s'inspire. Je ne pourrai pas dire si c'est une bonne ou une mauvaise adaptation. Par contre je peux vous dire avec une certaine confiance quant à ma subjectivité que c'est un bon film, même un très bon film. Un film qui m'a promis un concept auquel il se tient tout du long, je regrettais justement dans ma récente critique du film "Fantôme Utile " que son concept fort de départ soit au final balayé, je ne vais pas ici cacher mon enthousiasme à ce que celui-ci s'y conforme.
L'idée est simple. Dans le métro de Tokyo, un homme se retrouve coincé dans un couloir qui semble le ramener indéfiniment au même point à la recherche d'une mystérieuse sortie 8. Cette boucle sans fin - coucou la symbolique du chiffre 8 qui tourné d'un quart de tour forme le signe de l'infini - qui fait intervenir ce concept issu de la culture numérique au même titre que la "creepy pasta" qu'on appelle les "espaces liminaux".
Rapidement pour les deux du fond qui dormaient, on désigne de ce terme, né sur Internet, ces lieux familiers de notre quotidien, grands centres commerciaux, espaces publics, open-spaces professionnels, halls et couloirs de gares, que nous sommes habitués à fréquenter en même temps que d'autres gens, mais qui sitôt qu'ils sont désertés deviennent soudain des lieux dont l'étrange banalité ouvre l'imagination et où vont s'y projeter toutes sortes d'angoisses et appréhensions. Quelque part comme si la peur ancestrale aujourd'hui disparue de la sombre forêt où rode le grand méchant loup, avait été reportée vers la peur plus en phase avec notre monde coupé de la nature de la possibilité que caché dans ces lieux sans vies, qu'on traverse pourtant chaque jour, se trouve un danger.
Petit aparté "je me la pète avec ma culture" ces espaces étaient déjà définis par Emile Cioran dès les années 50.
Notre pauvre bougre comprend qu'il devra pour se sortir de ce piège infernal, que n'aurait pas renié comme torture, les cruels dieux antiques présidant au retour d'Ulysse (31) et de ses compagnons vers Ithaque, repérer dans sa boucle des "anomalies". La règle établie est sur le papier très simple, il avance, s'il repère une de ces anomalies, il fait demi-tour, s'il ne remarque rien il continue. Quand il respecte cette consigne il voit le panneau indiquant à quel numéro de sortie il en est faire le décompte de combiens d'anomalies il lui reste à découvrir pour atteindre la fameuse sortie 8.
Mais le jeu est vicieux, car s'il rate une anomalie, il repart de zéro et à chaque fois qu'il recommence son inspection des lieux les anomalies prennent une autre nature, ainsi il ne peut même pas jouer sur une mémoire des précédentes anomalies constatées pour avancer plus vite vers sa libération. Pire encore s'il croit avoir repéré un élément suspect, fait demi-tour comme le stipule les consignes et qu'il s'avère que ce n'était pas une anomalie, il se retrouve de nouveau à la sortie 0 et de nouveau il doit recommencer son parcours sisyphéen.
Un tel concept ne tiendrait pas si le film n'avait pas la politesse ou l'intelligence de faire deux choses essentielles pour son spectateur.
Premièrement nous faire participer à la quête des anomalies, le film devient presque un jeu où notre regard est invité à scruter le décor, pourtant minimaliste pour anticiper les choix ou non choix de l'homme piégé. Parfois nous voyons justes, parfois nos sens sont trompés, parfois nous avançons avec le gus, parfois nos impressions nous auraient ramenées au point de départ. C'est bête mais ça fonctionne.
Deuxièmement il faut que les anomalies surprennent à chaque fois et il faut aussi qu'elles soient à des niveaux d'étrangeté disparates, on aura par exemple une fois où l'anomalie sera juste un léger changement dans l'orientation d'un chiffre sur un panneau et puis après l'anomalie sera l'invasion des couloirs par des créatures informes résultats d'expériences en laboratoires dont on ne veut surtout pas connaitre les tenants et aboutissants.
Le film est fun, le film est divertissant, il provoque de vrais moments d'angoisse et même d'effroi, il est ludique, notre empathie vis à vis de ce mec lambda marche à fond, l'intervention de quelques personnages secondaires nous évite l'écueil de la répétition, et je pense en particulier à cet homme qui marche qui est autant source de vraie peur, de questionnement puis dans une parenthèse narrative dans laquelle il devient le centre névralgique du récit, source de profonde tristesse vis à vis de son destin.
Et encore une fois, si l'on excepte une très courte introduction pour justifier de façon logique dans l'espace et le temps comment notre anti héros s'est retrouvé dans ce couloir sorti des cercles de l'enfer de Dante, si l'on excepte une tentative d'explication au phénomène qui a le bon goût de, ni faire office de morale, ni de nous être donnée comme la clef de compréhension mais qui est juste posée là comme une fin possible parmi d'autres que chacun est libre d'apporter, le film déroule tout du long son idée forte de départ et jamais ne s'en écarte. J'en demande pas plus quand je m'installe dans une salle de cinéma pour y voir un film qui me promet ce genre de concept.
Je vais désormais arpenter les couloirs du métro différemment.
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Créée
le 5 sept. 2025
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