Des films de guerre, surtout ceux de la dernière guerre mondiale, la corde est un peu usée. Il faut se renouveler et c'est là une des prétentions de ce Fury. D'emblée le film se veut sale comme la gueule de nos ricains qui ne font pas dans la dentelle ni dans les prisonniers. Voilà qui cassera le mythe - quitte à en faire trop - mais malheureusement l'esprit contestataire se dissolve à mesure qu'avance l'intrigue.
Ainsi au fur et à mesure le film enchaîne les artifices scénaristiques convenus pour céder au spectaculaire. Le film pose une atmosphère et des personnages, mais se refuse à aller trop loin. On tue des hommes désarmés mais jamais véritablement innocents (et pour des raisons utilitaires). On a un chef qui se fait monstre, mais c'est pour mieux pleurer à l'ombre. On a violé des allemandes en masse mais on ne montre que de la prostitution et pire que tout une relation consentie improbable entre le nouveau bleu-bite et une jeune pucelle allemande. On oppose la conscience du conscrit face à l'horreur de la guerre, et le voilà dévergondé dès les premiers SS rencontrés. Les camarades tombent sous les balles mais jamais parmi nos héros aux visages de l’Amérique, groupés jusqu'au prévisible sacrifice final. Si encore ce dernier l'était en vain... Enfin celui qu'on pensait le plus irrécupérable de la bande finit par s'excuser, la salle lui accorde le pardon, mais sans lui retirer le privilège de
se faire tuer en premier (suivi très logiquement par l'immigré de service).
Au final, et après un encore plus prévisible deux ex machina, par une seule phrase le film s'achève comme il a débuté en consentant à une critique à peine mordante de la bravoure guerrière. Entre temps le désormais initié a eu le temps de se faire baptiser :
Machine.
Coïncidence ? C'est le nom de la catégorie dans laquelle je place ce Fury : Machine Hollywoodienne. Aussi efficace que désarmé d'une véritable audace.