Ancêtre de la série « Strip-tease », Grey Gardens est un documentaire aussi extravagant qu'indescriptible. Si l'on soupçonne d'abord la relation toxique d'une jeune femme abusant de sa mère âgée, on réalise vite qu'on assiste à l'inverse : la mère exécrable qui a égoïstement ruiné la vie de sa fille. Une douce folie règne dans cette maison sans âge, à l'image de ses habitantes, qui naviguent entre un présent suspendu où rien ne change et un passé glorieux dont il ne reste que des coupures de journaux et de vieilles photos. En vérité, on voyage entre les murs décrépis d'une propriété autrefois exceptionnelle, devenue un taudis de syllogomane. Des relations familiales entre gentillesse et paranoïa, entre résilience et solidarité, entre amour et haine. C'est terrible et puissant, c'est violent et beau. Un documentaire extraordinaire qui a sans aucun doute lancé de nombreux cinéastes du réel et contribué à poser les bases du cinéma direct. On a envie de crier haut et fort : "Go on, Little Edie, run away!".