Honey Don't!
4.3
Honey Don't!

Film de Ethan Coen (2025)

Quand un film en fait des caisses pour te persuader qu’il est cool (il ne l'est pas)

Margaret Qualley en détective privée lesbienne et coureuse de jupons, Aubrey Plaza en flic taciturne à la poigne de fer, et Chris Evans en gourou de secte perché jusque dans la stratosphère, le tout sur fond d'enquête à propos d'une série de meurtres, autant dire que la comédie noire de Ethan Coen, à l'ambiance assurément old school et au ton irrévérencieux au possible, avait de quoi donner envie. La déception en découvrant le carnage n'en est alors que plus grande.


Le film suit donc Honey O'Donahue (parfaitement insupportable à prononcer) qu'incarne Margaret Qualley, une détective privée qui va être amenée à enquêter au sujet d'un meurtre déguisé en accident de voiture, et qui va se révéler partie d'un ensemble plus grands de morts suspectes. Aidée par l'agent M.G Falcone (Aubrey Plaza), agent de police ainsi que son amante, elle tente de remonter la piste, qui la mènera notamment vers le Temple des Quatre Chemins, mené par le révérend Drew (Chris Evans), une secte servant notamment à dissimuler un vaste trafic de drogue.


Malgré un casting alléchant, un scénario juteux, et des personnages hauts en couleurs, Ethan Coen ne parvient à aucun moment à cuisiner ses ingrédients pourtant d'une évidente fraîcheur, et se retrouve à nous servir une bouillie informe. Si Chris Evans parvient à amuser avec un cabotinage entièrement assumé dans son rôle de gourou de secte sexuellement débridé, son personnage s'avère finalement n'avoir pratiquement aucun impact sur l'intrigue, et très peu de scènes marquantes. Margaret Qualley sombre elle aussi dans le surjeu pour un résultat un tantinet moins convaincant, et Aubrey Plaza, que l'on connaît pourtant pleine de talent, est ici affreusement fade et sans saveurs. La faute, sans doute, à une direction d'acteurs aux fraises, des dialogues qui ne sont qu'un sommet de ridicule, et au scénario pauvre au possible.


L'enquête semble ne mener nul part ou presque, l'histoire (bourrée de clichés) avance avec une lenteur qui rend encore plus visibles les autres défauts du film, et lorsque la « révélation » finale survient, même le semblant de surprise qui peut éventuellement s'en dégager ne suffit plus à sauver les meubles. Du reste, quelques séquences d'action, de baston, et autres joyeuses fusillades, sont occasionnellement plutôt bien mises en scène, sans jamais toutefois provoquer davantage qu'un haussement de sourcils. De même, alors que l'on aurait pu s'attendre à une photographie chatoyante, à des couleurs vives et une direction artistique plus chaleureuse pour coller à l'univers que l'on se figurait déjà rien qu'à l'affiche, rien de bien séduisant n'en ressort, et si le film est loin d'être laid, il en ressort tristement une image tout à fait quelconque la plupart du temps.


L'humour du film, très attendu au tournant, se révèle gras et souvent ridicule. Bien sur, le côté « sale gosse » du réalisateur donne à quelques reprises des instants d'amusement, surtout quand l'humour noir pointe le bout de son nez et donne dans une violence bête et méchante (l'on retiendra notamment une certaine scène sur un parking après une fellation refusée un peu trop vigoureusement). La plupart du temps, il peine néanmoins à faire mouche, et relève plutôt de l'immaturité. Notons aussi l'utilisation répétée ad nauseam d'une sexualité gratuite, dépossédée de toute sensualité, et que finit par trouver simplement vulgaire même l'auteur de ces lignes, qui n'a pourtant habituellement rien à redire concernant la présence de sexe à l'écran. Elle n'est ici au service de rien, et semble, vue sa répétition, ne servir qu'à remplir le vide du scénario. Le point culminant étant une scène de masturbation mutuelle au comptoir d'un bar, longue et inutile, qui se pense subversive parce qu'il s'agit de deux femmes.


Honey Don't est une cruelle déception tant il paraissait plein de promesses, et prouve une fois encore que Ethan n'aurait peut-être pas dû se séparer de son frère. Légèrement amusant, vaguement « cool » les rares fois ou le film ne semble pas en faire trop, et tout juste aidé par son casting pourtant bien mal utilisé, ce n'est probablement pas le pire film de l'année, mais vous l'aurez oublié dès votre visionnage achevé.


(L’impression persistante de regarder une sorte de sous-tarantino)

Cigarette-Burns
4
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le 3 oct. 2025

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Cigarette-Burns

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