Dans L’aigle s’est envolé, réalisé par John Sturges, on n’est pas simplement transportés dans la Seconde Guerre mondiale : on y entre comme dans un cauchemar d’honneur et de mensonge dans la boue, et Michael Caine n’est pas un héros confortable mais une ligne de fracture dans une morale embusquée. Le film, avec son intrigue autour de l’enlèvement fictif de Winston Churchill, ne cherche pas tant à surprendre qu’à malaxer la tension entre ce qui est joué — déguisements, duplicité, mission — et ce qui est vrai : la guerre, la peur, la trahison. Donald Sutherland en Liam Devlin, Robert Duvall en Radl, chacun chargé de loyautés contradictoires, chacun un peu salaud et un peu admirable — et Jenny Agutter, fragile comme un espoir au milieu de cette mécanique militaire.
On attendait une aventure de guerre, dramatique, exigeante : Jean-Christophe, Les Canons de Navarone, tout ce grand cinéma. Le ton, un peu austère, parfois grandiose, avec des moments de spectacle – l’arrivée des parachutistes, l’infiltration, les scènes tendues au village – ce sont autant de promesses tenues. Le scénario avance avec lourdeur, mais efficace : la mission folle est posée, le piège se referme.
Le film ne réinvente pas le genre ; clichés de l’espionnage militaire, de la guerre, de l’infiltration. Et pourtant, ces clichés sont employés comme un tissu de guerre, usés mais solides, parce que les personnages les portent avec ambiguïté. Steiner, un soldat allemand qui oppose le traitement des Juifs, Devlin, l’IRA membre, le rendant méritant d’intérêt.
L’aigle s’est envolé est un film d’aventure de guerre ancien-monde, solide, qui respire plus qu’il ne rugit. Il ne brille pas toujours, il ne surprend pas toujours, mais il reste imposant, honorable.
Note : 16 sur 20
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