Le quatrième long-métrage de Pascal Elbé, La Bonne étoile, est sorti dans les salles le 12 novembre. Cette comédie dramatique, qui se déroule sous l’occupation allemande, en 1940, est le fruit d’un subtil mélange des genres et d’un casting inspiré.


Ce n’est pas lui faire offense : on connaît davantage Pascal Elbé pour ses rôles d’acteur que pour les trois premiers films qu’il a réalisés. En dépit d’un accueil correct par la critique, Tête de turc en 2010, Je compte sur vous en 2015 et On est fait pour s’entendre en 2021 n’ont pas été des succès commerciaux.


Pour La Bonne étoile, le jeune réalisateur a posé sa caméra dans les Vosges. Un choix dicté par l’intrigue : le périple de Jean Chevalin (Benoît Poelvoorde) déserteur et chef de famille, bien décidé à se faire passer pour juif afin d’accéder à la zone libre. « En 1940, sous l’occupation […], les Vosges étaient un point de passage », a rappelé Pascal Elbé, lorsqu’il est venu présenter son long-métrage au Ciné-Quai, à Saint-Dizier, le 24 octobre. « Puis, quand on tourne un film d’époque, on est gêné par l’urbanisme, la modernité. Ici, on traverse des villages qui sont restés dans leur jus », ajoutait-il, au micro de France 3 Grand Est, lors du tournage, en juin 2024.


Dès lors, comment une fiction historique sur la Seconde Guerre mondiale peut être originale ? La période ne manque pas de références, qu’elle soit abordée sous son aspect le plus tragique (La Liste de Schindler, Le Pianiste), sous forme de satire (La Vie est belle), d’uchronie vengeresse (Inglourious Basterds) ou de comédie d’aventure (La Grande Vadrouille, La Folle Histoire de Max et Léon).


C’est entre la satire et le film d’aventures qu’on peut situer La Bonne étoile, et elle n’a pas à rougir face à ses grandes sœurs. Soyons francs : ni le scénario ni la mise en scène ne cassent les codes, et les premières minutes laissent penser qu’on va assister à une comédie oubliable, saupoudrée de rires goguenards et de bons sentiments.


C’était sans compter sur des personnages bien écrits et finement interprétés. Excepté Audrey Lamy, dont le rôle de femme au foyer n’a pas plus de profondeur que celui de Bonemine dans Astérix, on retrouve la trop rare Zabou Breitman et toute l’élégance qu’elle dégage. Hugo Becker confirme qu’il a une vraie “gueule” de cinéma et l’inénarrable Benoît Poelvoorde porte toute la dimension comique sur ses épaules.


Pascal Elbé livre un film subtil et finalement touchant. Montrer la réalité de la Shoah en France occupée et la collaboration policière avec l’Allemagne nazie suggère une certaine gravité. Le réalisateur offre un bol d’air au spectateur en mettant en scène les péripéties de la famille Chevalin. Appuyant sur les stéréotypes antisémites pour mieux les déconstruire, La Bonne étoile s’impose comme une bonne surprise, même si certains regretteront son formalisme.

Ervan
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le 10 nov. 2025

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