Avec ce film, je découvre Vincent Price (brièvement aperçu chez Tim Burton) et Roger Corman. Au delà d’un aspect général réussi, ce palace hanté possède pas mal de défauts qui m’ont empêché d’y voir un chef d’œuvre.


Adaptation très libre de Lovecraft, The Haunted Palace est avant tout un film d'ambiance, destiné à faire trembler les aficionados du cinéma de minuit. En un temps assez court, Corman arrive à nous balancer : un sorcier, un manoir perdu dans la lande, une malédiction, des mutants, des monstres, des revenants, etc., le tout dans un ensemble narratif plus ou moins cohérent. Un gros effort est fourni pour maintenir le spectateur en haleine devant ce conte macabre, mais ça tourne parfois un peu à vide.


Les décors, dans l'ensemble, sont excellents. Les nombreux plans sur le manoir de Curwen sont à se régaler les mirettes, tout comme toutes les scènes se déroulant à l’intérieur de ce même manoir. L’excellent générique et la scène d'intro plongée dans la nuit et la brume sont jubilatoires et très bien tournés, et plantent parfaitement l’ambiance gothique et sinistre du film. Par contre, le décor du village est beaucoup moins convaincant que ceux du château. On sent vraiment que ça a été tourné en studio, et les litres de fumée n’y changent rien. Par conséquent, certaines scènes qui se déroulent en pleine rue, comme l’assemblée des mutants ou l’immolation de Leach, perdent un peu voire beaucoup de leur puissance visuelle.
Le thème musical principal, lugubre à souhait et très facilement mémorable, contribue magistralement à cette ambiance gothique. Cependant, après 80 variations sur la même phrase de 4 secondes, la musique a tendance à taper un peu sur les nerfs, au point parfois d’accaparer l’attention du spectateur, ce qui est dommage vous en conviendrez.


Les acteurs, Vincent Price en tête, sont plutôt bons en misant beaucoup sur la subtilité et les nuances. Beaucoup de sentiments passent par les visages des personnages, parfois noyés sous des kilos de maquillage, mais ça contribue plutôt à l’atmosphère que de la casser. Malheureusement la subtilité est absente du scénario, qui ressemble parfois plus à un fourre-tout de l’horreur qu’à une véritable histoire. Même si l’ensemble est plus ou moins cohérent, comme je l’ai écrit plus haut, il n’en est pas moins un peu trop riche en scènes d’épouvantes (au demeurant très réussies), au détriment par exemple de certains personnages secondaires à peine survolés. Je pense à Simon le majordome et à Jabez, qui ont apparemment vécu plus de 110 ans dans le château sans que personne ne se pose de question ; ou bien à Hester, personnage complètement inutile s’il en est. On peut aussi se poser des questions du style : Pourquoi les villageois ont-ils attendu 110 ans pour brûler le château ? Mais le film est avant tout un divertissement, et il ne faudrait pas trop y réfléchir.


Dans l’ensemble, le récit manque cruellement de mystère. Tout au long de l'histoire, tout reste très prévisible. Au bout d'une dizaine de minutes, on peut à peu près deviner comment tout va se dérouler et se terminer. À aucun moment on ne ressent la tension, le suspense auxquels l'histoire et l'ambiance se prêtaient pourtant très bien. Un exemple : dans la scène où Anne se balade dans le château et voit une silhouette inquiétante s'approcher d’elle, on reconnait le majordome bien avant elle, ce qui casse complètement le suspense de la scène. Dans ce film, Corman a beaucoup de mal à nous faire ressentir l’angoisse à laquelle sont confrontés ses personnages, et presque rien n’est fait pour stimuler l’imagination du spectateur. On aurait pu imaginer que la transformation de Ward soit bien plus subtile et graduelle par exemple, et qu’on ne sache pas vraiment à quel moment Curwen prend le contrôle. Mais non : tout est prémâché, explicité, et ce même quand ce n’est pas nécessaire.


Signalons aussi quelques dialogues extrêmement ridicules :
- Mme Ward, vous allez venir avec moi !
- Non !
- Si !
- D’accord.
Et on a ça deux fois quand même...


Je m’attendais à un grand film d’épouvante, j’ai été un peu déçu. Mais peut-être en attendais-je un peu trop... Si on a affaire à un scénario très peu palpitant, il ne faut pas oublier que ce film est avant tout un film d’ambiance, un exemple du cinéma gothique. Malgré ses nombreux défauts, on passe un moment agréable. Il est esthétiquement très beau, les effets visuels n’ont pas trop vieilli et l’excellent Vincent Price justifie à lui-seul le visionnage de ce film.

YellowStone
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le 3 avr. 2013

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YellowStone

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