La vierge des tueurs est un film de feu.

C’est le témoignage artistique et ardent de l’attachement de Barbet Schroeder pour la Colombie où il vécu ses années de jeunesse. 

Il place le cinématographe dans les méandres de la ville de Medellin qui, à l’aube de l’an 2000, est plongée dans l’ultra violence quotidienne et mortelle, engendrée par la guerre urbaine que se livre entre-eux les jeunes gangs armés. 

Mais, malgré ce contexte, à chaque coin de rue, la religiosité flamboie. Elle est lumineuse, colorée. Sa beauté forge l’incandescence fraternelle et chaleureuse des colombiens.

Il y a aussi des chants d’amour véritables à Medellin.


A partir de cet état des lieux, le réalisateur va tisser l’histoire d’une rencontre entre, d’une part, un homme d’âge mûr, Fernando, qui revient sur les lieux de son enfance afin d’y finir sa vie, n’ayant plus le goût pour la société et, d’autre part, un adolescent, Alexis, natif de la ville, portant toujours sur lui un Bareta, car il sait que la mort qui rode,  peut surgir à chaque instant, au détour des rues.

Le réalisateur développe une inspiration brillante à chaque étape de la composition du long métrage. La dramaturgie est sublimée par de belles musiques traditionnelles afin de  dévoiler la spiritualité colombienne. L’ajout de musique originale appropriée va souligner et exprimer les sinuosités des émotions qui traversent les personnages du film.


La vie peut donc être courte à Medellin, comme le rappelle Fernando au coeur d’une scène allégorique sur le vol d’un vautour. Aussi l’âme colombienne fait une large place à l’humour, à la dérision du quotidien. D’ailleurs le détachement de Fernando, palpable dans son regard vague, se manifeste plus spectaculairement, lors d’une scène où il balance une chaîne HI FI, de manière nonchalante, par dessus le muret de la terrasse du logement qu’il occupe dans l'un des derniers étages d'un immeuble, qui offre une vue panoramique de toute beauté sur le bassin de la ville et ses montagnes.


Alexis tue très facilement avec son Bareta mais participe au pèlerinage de la vierge à Sabaneta.

Alexis tue mais est aussi capable d’aimer véritablement. Ainsi, dans une scène maîtrisée et déchirante, il prouve son amour pour Fernando, en lui offrant sa vie afin de le protéger et le sauver.


La disparition d’Alexis va être suivie de l’apparition d’un autre garçon dans le quotidien de Fernando, Wilmar,  qui ressemble étrangement à son jeune amant décédé, bien qu’il ne soit pas son frère. C’est très troublant pour Fernando, mais comme c’est aussi pour lui un vivifiant moment du retour de la mort à la vie, il va adouber une liaison avec lui.

Fernando va finir par apprendre le secret que Wilmar ne lui a pas encore révélé.

Lorsque celui-ci lui avouera sincèrement la vérité, Fernando lui pardonnera. Wilmar lui dira alors qu’il l’aime. Mais Fernando et Wilmar pourront-ils échapper aux aspérités infernales de la ville de Medellin ?


La vierge des tueurs est un film subtil, halluciné et courageux. La qualité dans l’écriture au scalpel des dialogues, contribue à sa cohérence et à sa poétique. A voir et revoir.


J-J-P-P
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le 9 mai 2024

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