Titre inspiré du célèbre morceau de James Brown.


Hop, petit mot au début pour dire que je vais un peu spoiler le film…


« The Last Duel ». Film que j’attendais, évidemment avec un tel casting, mais pas tant que ça, à vrai dire, je ne savais même pas qu’il sortait ce mois-ci. Mais, j’y suis allé avec l’espoir de passer un bon moment et avec l’espoir de revoir un grand Ridley Scott. Et je n’ai pas été déçu et étais même surpris. En effet, ce film fait partie des meilleurs films de cette année selon moi et il fallait que j’écrive un petit truc sur ce film et sur le retour d’un réalisateur que j’aime beaucoup…



Ridley Scott



Un des premiers réalisateurs que j’ai pu découvrir dans mon enfance avec des chefs d’oeuvres, selon moi, tels que Gladiator, La Chute du Faucon Noir et Alien, ainsi qu’une pléthore d’autres films de qualité comme Kingdom of Heaven, A Armes Egales (que j’ai vu je ne sais combien de fois, bien que maintenant je le revois un peu à la rabaisse), Prometheus, etc, etc, etc. Bref, c’est un réalisateur qui a énormément contribué à ma cinéphilie. Mais, il est vrai que ces dernières temps, les créations de papy Ridley ne m’ont pas mis d’énormes claques comme avant bien que je les apprécie quand même : Covenant, Cartel (d’ailleurs il faudrait que je voie sa version longue), The Martian…


Et là, arrive 2021, arrive le dernier Ridley Scott, arrive The Last Duel qui m’a offert une des meilleures expériences cinématographiques de cette année.



La Vérité selon BestNumber



j’avoue, c’est pas le meilleur pseudo.


Tout d’abord, ce dernier Scott met en scène une rivalité entre Jean de Carrouges et Jacques Le Gris qui va exploser lorsque Marguerite de Thibouville va avouer s’être faite abuser par Le Gris.
On va commencer par l’essence de tout bon film : le scénario. Je le trouve vraiment intéressant dans son propos, mais aussi d’un point de vue formel, il est captivant. Tout simplement parce qu’il se réinvente à chaque fois, puisque le film a eu l’idée ingénieuse de découper son scénario en trois chapitres, chacun représentant l’histoire perçue et ressentie par un personnage. On prend plaisir à revoir ces scènes et à remarquer les différences : l’ajout ou l’absence de répliques ou un regard qui donne un nouveau sens à la scène. Et on commence avec le début du duel qui va s’arrêter au premier coup de lance pour commencer l’histoire. Cela donne envie de connaître le pourquoi du comment, mais aussi et surtout d’en voir plus. Le film démarre réellement avec le chapitre centré sur Jean de Carrouges où l’on va découvrir les événements et les personnages pour la première fois. Interprété par Matt Damon, Jean nous est montré comme un bon et loyal guerrier qui n’hésite pas à attaquer et foncer pour remplir sa mission. Il va même sauver la vie de son ami Le Gris. On a devant nous un combattant estimé. Et pourtant, il va être mis de côté par Pierre d’Alençon et être privé de son titre de Capitaine au profit de Le Gris. Ce dernier est vu alors comme un opportuniste. Le spectateur et Carrouges prennent cela comme une injustice. Pourtant, lorsqu’il revoit son ami, lors d’une fête, il va fièrement lui serrer la main et poser sa seconde au-dessus de celle de Le Gris en signe d’amitié. Mais Jean est aussi, un mari dévoué. En effet, cette partie instaure une romance entre Jean et Marguerite : on suit leur mariage et leur vie d’exilés, ensemble. C’est un mari aimant, tendre et sensible. Il va tout faire pour laver l’honneur de son épouse et la venger. Le grand méchant est alors Jacques Le Gris aux yeux du spectateur.
Arrive maintenant le chapitre concernant l’antagoniste du film. C’est tout ce que le spectateur sait du personnage. Et pourtant, les scénaristes ont eu la bonne idée de le rendre immédiatement plus sympathique. Lui aussi est un très bon guerrier, lui aussi va sauver son ami, mais lui ne va pas s’en vanter, il me semble, contrairement à Carrouges. A la cour, Le Gris va défendre son ami et ne va pas vouloir de ce titre de Capitaine. Il passe (un peu) moins pour le grand méchant loup en faisant des blagues aux dîners, alors que Carrouges passe pour chevalier irritable et capricieux. Lors de cette fête, il me semble que c’est l’inverse, c’est lui qui est le plus avenant envers Carrouges. De plus, selon lui, il n’a pas commis un viol, mais un adultère. Elle et lui étaient attirés et cela devait arriver.
Arrive enfin la dernière partie du film, où la troisième scénariste Nicole Holofcener, a été d’une grande aide à Damon et Affleck, apportant avec elle une touche de féminité très importante pour ce chapitre. Un chapitre ayant comme intitulé : La vérité selon Marguerite… La Vérité. Une partie déterminante qui va montrer le vrai visage de ces deux hommes, aux égos surdimensionnés. Des brutes opportunistes et vénaux. Son mariage avec Carrouges n’avait rien d’une romance et elle a été obligé de l’aimer. Celui-ci est en réalité un homme odieux qui ne se bat pas pour elle mais seulement pour son propre honneur, puisqu’à cette époque, un viol contre une femme mariée, n’outrage pas cette dernière mais uniquement la propriété du mari. Le Gris est terrifiant dans cette partie, où la connotation de cette réplique : « si tu cours, je te rattraperai », change radicalement, passant du jeu à un acte horrifiant. La scène du viol est très bien filmée, avec cette caméra tremblotante qui s’intéresse uniquement à Marguerite et à sa détresse.


D’un point de vue esthétique, le film est également une réussite. Les costumes sont soignés et les armures sont stylés. La colorimétrie est elle aussi très travaillée offrant de très beaux plans, bien que n’utilisant une palette de couleurs très limitée et assez clichée pour ce genre de films et rendant une sorte d’hommage à un des personnages, puisque le gris est une des couleurs les plus prépondérantes. Certains décors sont évidemment fait en numérique et ça se voit. On a plus l’impression de voir un concept art et ça manque d’authenticité. Mais encore une fois, ça passe, puisque l’image de Dariusz Wolski n’est vraiment pas désagréable, bien au contraire. Et les tous derniers plans sont très significatifs grâce à la colorimétrie. En effet, pour la toute première fois, il y a de la couleur : le vert est vraiment vert pour montrer une Marguerite heureuse avec son fils, sans aucun autre homme pour lui faire de l’ombre, lui manquer de respect ou encore lui faire du mal. Elle s’en est sortie plus forte comme le montre le dernier plan en légère contre-plongée, elle, centrée dans l’image.


La musique du compositeur Harry Gregson-Williams est évidemment très bonne et nous met encore plus dans l’ambiance. La Bande-Originale propose des musiques aux notes médiévales et épiques. D’ailleurs certaines m’ont un peu faites penser aux morceaux de Kingdom of Heaven, du même compositeur, avec ces cheurs : notamment dans « I Offer You A Name ». Sinon, j’aime beaucoup cette montée en tension avant le duel dans « Duel Preparations »: des notes très aiguës régulières qui vont sonner de plus en plus fortes, accompagnées par de lourdes percussions et un choeur, qui viennent apporter ce côté épique. On peut également trouver dans cette B.O. des morceaux plus doux comme « Marguerite de Carrouges » ou encore « I’ve Never Seen You Like This ». Un très bon travail effectué sur la musique, donc, en parfaite adéquation avec l’esprit du métrage : les thèmes se déformant en fonction de qui raconte l’histoire.


Les acteurs sont tous excellents et se donnent à fond. Alex Lawther joue très bien ce Roi complètement détestable et stupide, Adam Nagaitis que j’ai pris plaisir à revoir dans ce film, puisqu’il a été incroyable dans la série The Terror, produite par Scott d’ailleurs. Mais, je m’attendais à ce qu’il ait un peu plus d’importance dans ce film, c’est un peu dommage. Ben Affleck est lui aussi remarquable dans ce rôle du comte libertin et irrévérencieux. Et Matt Damon ainsi qu’Adam Driver nous offrent une confrontation à la hauteur. Ils réussissent à être attachants par moments et deviennent monstrueux et terrifiants au fur et à mesure que le film avance. Cela a du être intéressant pour eux, puisqu’ils devaient explorer plusieurs émotions éprouvant le spectateur en le faisant passer par différentes émotions.
Les actrices sont elles aussi excellentes, notamment Harriet Walter qui joue un personnage froid, mais qui devient presque touchant vers la fin. Enfin, celle qui vole la vedette aux autres au point de m’en faire oublier le duel : Jodie Comer qui interprète avec brio Marguerite et retranscrit parfaitement sa pureté ainsi que sa sensibilité. Chacun d’eux a réussi à donner de l’épaisseur à leur personnage, ils ne font jamais fausse route et sont toujours juste et ce grâce à une bonne direction d’acteur et à leur talent évidemment, et par conséquent leurs répliques n’en sont que plus impactantes.



« Puisque je vois qu’on ne peut pas discuter, on va faire un duel »



Les scènes d’actions sont évidemment réussies et vraiment immersives. La caméra du réalisateur et du chef opérateur est au plus proche des combattants, impliquant le spectateur dans le combat. On ressent tout, on ressent le poids des armures, le poids des épées, mais aussi et surtout le poids des corps et leur force. On ressent la puissance des coups et ce grâce à une très bonne réalisation, mais aussi grâce au son. Le son des métaux qui s’entrechoquent aide à retranscrire la cruauté des combats et pour prendre un autre exemple, la charge à cheval devient beaucoup plus impressionnante. Bref, le sound design est parfaitement géré lui aussi. La chorégraphie des combats est également travaillée, notamment lors de ce Duel final. Un duel Monumental, épique et sanglant. D’ailleurs le sang est mis en valeur je trouve et c’est cool. L’affrontement est très immersif, rythmé et la caméra est toujours aussi efficace. C’est un duel fort en émotions où l’on se souci plus du sort de Marguerite que de la véritable issue du combat, puisque l’on a plus aucun affect pour ces deux hommes. Bref, la Violence est parfaitement bien retranscrite.



"Le "Dernier duel" est clairement un film féministe"



Affirme Ridley Scott lors de son entretien avec Paris Match.


L’intrigue tourne autour de Marguerite de Thibouville en faisant, petit à petit, passer au second plan la rivalité des deux hommes, puisque, comme dit précédemment, le duel, selon moi, n’est plus vraiment l’élément central du film. De plus, elle ne donne pas une certaine vision de la vérité, mais bel et bien La Vérité. Ce long-métrage montre bien la place de la femme à cette époque. Elle occupe une place bien moins importante que celle des hommes. En effet, on peut le voir au travers du parcours de Marguerite : elle était la propriété de son père, qui l’a vendu, pour ainsi dire, et elle devint la propriété de Carrouges. Aussi, on peut le voir à la fin du duel, lorsqu’ils sortent en vainqueur de l’arène. Toute la foule accourt autour de Carrouges pour le féliciter de son combat, mais personne ne se soucie de celle qui a subi l’agression et qui justement a osé en parler, s’élever face à son mari et son agresseur, afin de se battre pour laver son honneur et pour enfin se libérer de leurs emprises. En effet, et on le voit sur l’affiche, où elle est, en quelque sorte, emprisonnée entre ces deux épées. Nous pouvons, d’ailleurs, trouver des similitudes entre Marguerite et la jument. Elles sont toutes les deux blanches qui symbolise leur pureté, mais elles sont aussi toutes les deux, prisonnières de Carrouges qui les empêche de sortir et qui les emprisonne dans son domaine. Elles sont à lui. On peut aussi faire un rapprochement entre le viol de la jument et celui de Marguerite : le cheval noir symbolisant Jacques Le Gris dans sa tenue, elle aussi, noire. Jean de Carrouges entre alors dans une colère noire, puisqu’il ne veut pas que l’on touche à sa propriété, qu’on la bafoue. Suite à ce viol, Marguerite n’a pas de voix et elle ne peut pas s’en sortir et gagner le procès seule, elle a besoin que ces hommes se battent et règlent son problème. Qui est, dans leur réalité, leur problème : c’est un duel d’égo. Duel qui était à l’époque, le plus souvent évité : le mari se faisant dédommager pour l’embarras occasionné. De plus, la chose la plus sûre à faire était de se taire : la femme risquant de mourir sur un bûcher, brûlée. Le film montre, donc, tout le courage de Marguerite...


Le film parle également de l’Église et de la place importante qu’elle avait à l’époque et aussi de son absurdité : je pense notamment à leur définition d’un viol...


Enfin, le film parle également du viol et des différentes réactions des victimes suite à cet événement. Et c’est un sujet qui est d’actualité. Marguerite représenterait ces femmes qui se sont faites violer et qui ont eu le courage de se révolter par la suite, même si on ne les croit pas et même si on lui dit qu’il est préférable pour elle de garder le silence: ce qu’a fait la mère de Carrouges. Donc oui, le film est féministe et c’est la femme qui dit la vérité, c’est sa partie qui brise toute l’ambiguïté du film, puisque les scénaristes ont certainement voulu donner la parole à cette femme et ne pas vouloir émettre des soupçons à son égard...


Bref, The Last Duel est un excellent film, très intéressant tant sur le fond que sur la forme. Ridley Scott a signé un grand retour et j’espère qu’il va continuer sur cette lancée avec « House of Gucci », mais également avec ses prochains projets qui vont porter sur Napoléon avec Joaquin Phoenix et Jodie Comer, mais aussi et surtout, sur la suite de Gladiator : autant dire que j’en attends déjà énormément.


« Six siècles pour montrer que les choses ne changent jamais vraiment.
C’est en quelque sorte la première affaire Epstein de l’histoire » .
Ridley Scott.

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le 4 nov. 2021

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