Titre familier pour une réalité sociale plus âpre

Le gamin au vélo est un film qui aborde avec justesse la vie d'un garçon presque orphelin qui se débat pour trouver un sens à sa vie déjà semée d'embûches. Entre son centre pour gamins qui essaye de l'éduquer au delà de la rupture familiale, son vrai père qui refuse de l'assumer, sa bonne fée coiffeuse,Samantha (Cécile de France toute en sobriété et à la compassion silencieuse), qui lui accorde de l'amour et de l'attention et la tentation de l'argent facile avec un jeune dealer, Cyril se disperse et a du mal à discerner le mal des bonnes choses de la vie. Son manque de repères le rend vulnérable,fragile, prêt à éclater à la moindre contrariété. Les Frères Dardenne filment bien ce jeune garçon paumé qui a encore cependant la force de sourire et de croquer la vie.
C'est toute la dichotomie du Gamin au Vélo. Un titre familier pour une réalité sociale plus âpre avec la banlieue belge, ses petits trafics et la violence qui surgit à n'importe quel coin de rue. Les scènes où Cyril se fait voler son vélo, ultime objet qui le rattache à l'insouciance de son enfance, ramènent inévitablement à un classique italien, Ladro di bicicletta. Bien sûr, le jeune garçon n'a pas besoin de son VTT pour gagner sa vie mais juste pour se relier aux essentiels qui relient sa vie: Samantha, un foyer chaud, un morceau de gâteau au chocolat qui lui rappellent que la vie peut être plaisante et agréable. C'est aussi un moyen de locomotion qui lui permet d'échapper à ses actes manqués, sa face sombre. La démarche des frères Dardenne est donc loin d'être gratuite, voire même symboliste et révélatrice de cette crise identitaire des jeunes défavorisés par le système.
Dans ce film des deux frères belges, il y a pourtant une note d'espoir dans ses derniers plans ( qui illumine d'ailleurs l'affiche du film). Le fait que Samantha utilise aussi et à son tour un vélo suggère son acceptation finalement plus sûre de Cyril, une "maternité" d'abord inattendue qu'elle est prête à embrasser car elle a pleine conscience d'une telle responsabilité. C'est magnifique,émouvant et solaire même si le pire n'est jamais certain et qu'un coup de dé peut changer la donne. Philosophie ô combien lucide car l'humanité oscillera toujours entre clair et obscur. Merci les Frères Dardenne de nous le rappeller avec votre délicatesse et vos yeux bien ouverts.

Specliseur
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le 23 juin 2016

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