En 2022 - soixante ans plus tard - on redécouvre un film de "politique fiction" français tourné en 1961 d'après un livre de Simenon, avec d'autant plus de plaisir qu'on a Jean Gabin en ancien président du Conseil de la IVème République et Bernard Blier en directeur de cabinet ambitieux et affairiste ("Ah ! Chalamont"...). Leur collaboration puis leurs affrontements sont mis en scène en alternant scènes actuelles et flashbacks sur des événements survenus 15 ans plus tôt, quand "le président" était en fonction.
La discussion autour des Etats Unis d'Europe est étonnamment moderne dans les arguments échangés au parlement. Il semble que le film fut à l'époque taxé d'"antiparlementarisme", et ce serait à cause des envolées superbes de Gabin contre la corruption et le colonialisme (très soigneusement documentées et brillamment écrites par Verneuil et Audiard).
On observe alors avec étonnement que la tendance à camoufler leurs intérêts privés, prétendument pour préserver la démocratie dans leurs relations personnelles avec la société, pour la noblesse de défendre les libertés individuelles, n'était pas seulement l'apanage des députés. Elle était alors bien diffuse dans toute la société et la critique de cinéma n'y échappait pas : nombre de ses représentants de l'époque s'offusquèrent bêtement des discours de Gabin.
Ainsi, on découvre, soixante plus tard, que le cinéma populaire de Verneuil du début des années 60 était, était, dans sa thématique inspirée de Simenon, plus insolent politiquement que ne le sera la Nouvelle Vague à la fin de cette décennie là.
(Notule de 2022 publiée en octobre 2025).