Porté par deux actrices impeccables, ce drame juste et poignant affirme le talent de la réalisatrice Laura Wandel et l’acuité de son regard clinique (littéralement) pour capter les déchirements intimes au cœur des institutions.

Lorsque l’État intervient dans la garde parentale contre l’avis des parents, cela peut donner à des situations complexes, déchirantes et parfois violentes. C’est exactement ce qui se passe lorsqu’Adam (Jules Delsart), quatre ans, est hospitalisé pour malnutrition. Sa mère, Rebecca (Anamaria Vartolomei), est rapidement identifiée comme un facteur aggravant pour la santé de l’enfant. Les services de l’enfance souhaitent l’éloigner pendant la convalescence de son fils mais Lucy (Léa Drucker), l’infirmière en charge, est intimement convaincue que la mère a un rôle important à jouer pour la santé de l’enfant.

La réalisatrice belge Laura Wandel avait fait forte impression en 2022 avec son premier long-métrage, Un monde, où sa caméra, à hauteur d’enfant, suivait des élèves qui se faisaient harcelés à l’école. Dans ce second film, on retrouve les mêmes ingrédients : un lieu clos (l’hôpital), des longs plans-séquence immersifs au plus près des personnages et des protagonistes qui utilisent leur marge de manœuvre dans un carcan oppressant. Une nouvelle fois, la cinéaste signe un thriller social convaincant, servi notamment par deux comédiennes excellentes. Anamaria Vartolomei, la révélation de L’Événement, s’en sort avec les honneurs, car son rôle est particulièrement ingrat et difficile. Face à elle, Léa Drucker incarne une sorte d’Ethan Hunt paramédicale, toujours en porte-à-faux avec sa hiérarchie (et donc le système) pour ce qu’elle considère comme le bien de l’enfant et de sa mère. Contrairement à son alter égo du cinéma d’action qui est aussi frénétique qu’agité, la détermination de Lucy demeure toujours sereine, opportune et jamais tapageuse.

Techniquement, Laura Wandel retrouve le chef-opérateur et le monteur de Un monde. La facilité et la fluidité avec laquelle la caméra glisse dans les couloirs, suit les personnages et épouse leur regard est impressionnante. Malgré une durée brève et un déroulé quasiment en temps réel, le film parvient à esquisser, en creux, le contexte personnel de ses personnages. Ainsi, la caméra, le montage et le scénario ne forment plus qu’un.

Tout n’est pas pour autant parfait. Si Wandel réussit particulièrement bien la construction de ses protagonistes, elle peine un pu plus avec son portrait sociologique de l’hôpital. On sent même volonté de raconter ce lieu et sa complexité dans les interstices du récit, mais ces tentatives s’apparentent plutôt à des digressions. Les situations présentées, même si réalistes (par exemple une ado qui doit avorter sans alerter sa famille), paraissent téléphonées et ont été déjà vues de nombreuses fois. Ces scènes apportent de la tension dramatique au récit, sans véritablement enrichir le propos.

Ces réserves ne sont toutefois que des symptômes bénins et pour une fois, on ne peut que vous souhaiter d’aller faire un séjour à l’hôpital !

el_blasio
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2025

Créée

le 24 sept. 2025

Critique lue 3 fois

1 j'aime

el_blasio

Écrit par

Critique lue 3 fois

1

D'autres avis sur L’Intérêt d’Adam

L’Intérêt d’Adam
Dofran
4

Mais au fait… Quel est l’intérêt d’Adam?

"L'intérêt d'Adam" : film de la cinéaste qui réalisa l'excellent "Un monde" sur le harcèlement scolaire ; mais cette nouvelle réalisation ne tient pas ses promesses et est même exaspérant à bien des...

le 20 sept. 2025

8 j'aime

1

L’Intérêt d’Adam
Cinephile-doux
7

Quand l'hôpital ne se fout pas de la charité

Il est un peu tôt, après seulement deux longs métrages, mais il semble assez évident que ce qu"aime par dessus tout Laura Wandel, dans son cinéma, c'est de nous placer en immersion, au cœur de toutes...

le 2 juil. 2025

8 j'aime

L’Intérêt d’Adam
Le-General
7

L’Intérêt d’Adam est une œuvre brève, mais dont l’écho résonne longtemps.

Laura Wandel filme toujours au plus près des corps et des regards. Après Un monde, qui scrutait la violence des cours d’école, elle revient avec une œuvre plus intime encore, presque murmurée :...

le 18 sept. 2025

5 j'aime

Du même critique

Don't Look Up - Déni cosmique
el_blasio
5

Don't Watch Up

Malgré un postulat malin et bien-vu, cette farce s’avère être finalement assommante et répétitive. Un casting prestigieux et beaucoup d’agitation pour pas grand-chose. Cela fait une vingtaine...

le 10 déc. 2021

75 j'aime

4

Jamais plus – It Ends With Us
el_blasio
5

La vie en pas si rose

Cette romance impose à son public le même phénomène que vit son héroïne : la dissociation cognitive. Des clichés à la pelle, un cinéma très illustratif, un scénario digne d’un roman de gare… pour...

le 14 août 2024

20 j'aime

Premières Vacances
el_blasio
4

le beau beauf et la bobo

Qui n’a jamais eu envie de partir en vacances en Bulgarie avec un beau beauf et une bobo parisienne ? Personne ? Pourtant, c’est exactement ce que propose Premières vacances. Ben et Marion n’ont pas...

le 9 déc. 2018

16 j'aime