Love est un film sur le fantasme. Le fantasme de l’amour d’abord, quintessence de l’émotion humaine, sensation ultime et impalpable, jamais assez questionnée ni assez célébrée à travers un quelconque médium. Le rêve d’un amour disparu, définitivement terminé, laissant des souvenirs à vif, contrastant ces moments gravés dans la pierre à la solitude concrète de Murphy, pourtant fraîchement père de famille. Un seul être vous manque...
Le fantasme du sexe, parfois violent, parfois doux, toujours passionné. Le fantasme du sexe, avec une inconnue rencontrée deux minutes auparavant, du sexe à plus que deux, le mélange des corps rendant presque impossible de les discerner avec justesse tant l’alchimie est là. Maggot Brain.
Le fantasme de la drogue, des drogues, de tout l’éventail de sensation extrêmes proposées par diverses substances.
Lieux communs des fantasmes adolescents, ces trois chimères paraissent mises en avant, ensemble, tant elles sont représentées de nombreuses fois au long du film. Et les thématiques me parlent, m’émeuvent, me font frissonner, réfléchir.
Mais les fantasmes sont jeux dangereux. La relation entre Murhy et Electra semble inévitablement décliner dès la réalisation de ce ménage à trois. Les tentations deviennent multiples, incontrôlables, et Murphy finit par faire régulièrement l’amour avec Omi, qui sera, bien contre son gré, mère de son enfant. Frénésie des désirs, attraction venimeuse pour la chair, ciguë de la sanité de la relation amoureuse.


Or, Love est un film profondément ancré dans la réalité. Dès la première minute ; le réveil sonne, tirant des rêves et du sommeil paisible, amenant Murphy vers son enfant, celui dont il doit s’occuper, celui autour duquel sa vie tourne désormais, à des années-lumières des moments qu’il s’apprête à ressasser.
Un coup de téléphone, celui de la mère d’Electra, triste femme dont l’inquiétude est étouffante sans nouvelle de sa fille depuis deux mois.
Une histoire d’amour enflammée mais terminée, une femme déchirée, droguée, peut-être même morte, un homme qui regrette, qui maudit la terre entière, qui donnerait n’importe quoi pour une seconde chance, pour un retour dans le passé. Que l’on voit marteler la porte d’un appartement pendant de longues secondes, incarnation du désespoir, de cette si pénible réalité sans échappatoire.


Mais Love n’a pas trahi son intitulé. Love est un film sur l’amour. L’amour, encore et toujours. Qu’il soit passionné, charnel, tendre, nostalgique, naissant, torturé, paternel ou perdu, l’amour est omniprésent, manifeste dans l’essentiel des plans. Dans les souvenirs évidemment, multiples, de sexe passionné et de complicité évidente. De discussions basiques, potentielles tentatives d’élans métaphysiques décevantes, dont on ne peut encenser ni la profondeur ni la subtilité mais auxquelles on peut s’identifier. Car l’amour est mentionné par Murphy, comme raison d’être de la vie, comme seule raison valable de se pas se suicider sur le champ, comme remède magnifique à la vacuité de l’existence, à la non-existence du temps, aux questions qui n’auront jamais de réponse. A la mort aussi, Electra souhaitant que Murphy retombe amoureux encore et encore, si elle venait à mourir.


Amour charnel, essentiellement. Tantôt dans une lumière rouge puissante, tantôt à la douce lumière du soleil, les corps sont visibles, sous toutes les coutures, dans leurs mouvement les plus spontanés et primitifs. Les corps et leurs fluides, salive, sueur, cyprine, sperme, lesquels offrent, dans leurs divers mélanges, une beauté particulière à l’ensemble.
Le parti-pris de montrer autant de sexe me paraît sensé ; certains moments marqués par un amour que je ressens comme pur me paraissent scellés dans l’univers à jamais, souvenirs ad vitam eternam et surpassement total de la réalité extérieure, du monde dans lequel nous vivons, de la mort si proche, fixés dans l’éternité. Et j’ai imaginé les personnages ressentir des éclats de ça..


Love est la fenêtre, à travers les yeux de Murphy d’une relation amoureuse, sincère, tumultueuse mais intense, de deux êtres qui se sont aimés. Fenêtre ouverte sur une palette d’émotions, qui peuvent être transmises et ressenties dans le moindre plan d’apparence anodine. Et là réside, en mon sens, l’universelle beauté de l’objet artistique.

Amarillowve
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le 15 janv. 2017

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