Dès les premières images, Mademoiselle transporte le spectateur dans un univers années 30 à la fois somptueux et inquiétant, où chaque détail visuel compte. Park Chan-Wook signe ici une œuvre baroque et virtuose, qui marie à la perfection l’élégance des décors d’époque et la modernité de la mise en scène. Les paysages naturels et les intérieurs raffinés des maisons japonaises offrent un écrin magnifique à cette histoire d’amour, de trahison et de manipulation.
Le scénario, inspiré du roman Fingersmith de Sarah Waters, est particulièrement bien construit. Il se déploie en trois parties, chaque segment apportant une nouvelle perspective sur les événements et permettant de mieux comprendre la psychologie complexe des personnages. Ce choix narratif évite la redondance et maintient l’intérêt du spectateur tout au long du film. Ainsi la surprise reste intacte, même lorsque certaines scènes sont revues sous un autre angle.
Leur relation des deux héroïnes, qui évolue de la méfiance à la complicité puis à l’amour, est au cœur du film. Leur parcours, marqué par la trahison, la manipulation et la quête d’émancipation, est traité avec beaucoup de finesse et de sensibilité.
Park Chan-Wook ne se contente pas d’offrir un film esthétiquement sublime : il y injecte une bonne dose d’humour noir, de suspense et même de touches d’horreur. Ainsi le cabinet de curiosités clandestin du sous-sol qui abrite sur ses nombreuses étagères des pièces anatomiques dans des bocaux de formol, des massicots tranchants, une pieuvre gigantesque, semble tout droit sorti d'un cauchemar.
Le film joue beaucoup sur la dualité des choses (manoir gothique/maison, japonaise), éveil à la sensualité / débauche sadique, sincérité/duperie, esclavage sexuel / liberté et émancipation.
Une seule chose m'a gênée au final dans ce film brillant : l'abus et la longueur des scènes érotiques entre ces deux jeunes filles aux corps d'enfant. L'amour se donne à voir, ostensiblement. Sans pudeur. Trop...