Mantis (Lee Tae-sung, 2025) est le spin-off attendu du très bon Kill Boksoon (2023) - et le film preuve, si Netflix réussit à créer sa propre franchise John Wick à la coréenne pour rameuter abonné-e-s et séduire les foules.
Autant vous prévenir de suite : ce film réussit quasiment à tuer toute franchise dans l'oeuf !
Vous connaissez éventuellement mon habituelle méfiance — voire mon désamour — à l’égard des productions Netflix, souvent trop formatées, qui recyclent la "hype" coréenne pour livrer des produits calibrés selon un cahier des charges américain. Mais je dois reconnaître que Kill Boksoon remplit parfaitement sa mission, malgré les traditionnelles vingt à trente minutes « de trop ». Le film aurait sans doute gagné en impact s’il avait été un peu resserré à plusieurs moments, mais il parvient malgré tout à garder son énergie et son identité.
L'actrice Jeon Do-yeon s’était donnée à cœur joie dans le rôle de cette tueuse à gages d’une élégance implacable, ravie d’en mettre plein la vue à quiconque oserait remettre en question son âge ou ses talents — toujours aussi affûtés, quoi qu’on en dise. Et sa double-nature de tueuse et de maman est parfaitement développée en ayant donné un vrai plus au premier film.
Mantis (ou La Mante dans la version originale) est un personnage à peine évoqué dans Kill Boksoon. Il s’agit en réalité d’un jeune tueur d’élite, prodigieusement doué, à la fois enviée et redoutée dans le milieu des assassins professionnels. Le film reprend le fil là où s’achevait Kill Boksoon : la puissante guilde des tueurs à gages est désormais profondément ébranlée, et Mantis s’inscrit dans ce contexte de désordre et de recomposition des forces, où chacun tente de redéfinir sa place dans un système en pleine implosion.
Honnêtement, dès la séquence d’ouverture, le spectateur comprend que ce spin-off ne rivalisera jamais avec la qualité du film original. Cela se ressent immédiatement dans les premières images nocturnes : les efforts de postproduction sont visiblement en deçà, et là où Kill Boksoon offrait une qualité d'image impeccable, Mantis paraît bâclé, presque tourné à la va-vite. L’arrivée du personnage principal confirme d’emblée un nouveau ton adopté : un registre désinvolte et humoristique, clairement orienté vers un public adolescent ou jeune adulte, loin de la gravité et de la sophistication du modèle dont il s’inspire.
Dans le rôle principal, la charismatique Jeon Do-yeon cède la place au plus facétieux Im Si-wan, ancien membre du boys band ZE:A, qui a su négocier avec succès sa transition vers la comédie et le drame. Il s’est fait remarquer dans plusieurs k-dramas populaires comme Reply 1997 (2012) ou les saisons 2 et 3 de Squid Game (2024-25), et au cinéma dans Sans pitié (2017), Emergency Declaration (2022) ou Road to Boston (2023).
S’il n’est jamais désagréable à l’écran, le changement de ton qu’il incarne se fait néanmoins sentir : après la relative subtilité du premier film, la légèreté presque potache de Mantis déroute. Et, personnellement, j’ai vite déchanté en découvrant le parti pris des scènes d’action — dès la première confrontation, l’usage trop visible des câbles, censés dynamiser les combats, donne au tout un aspect artificiel et maladroit.
Car oui, Mantis est en réalité le premier long métrage réalisé par Lee Tae-sung, acteur passé derrière la caméra après avoir officié comme assistant sur Kill Boksoon afin d’apprendre le métier et de s’imprégner de son univers singulier. Le cinéaste Byun Sung-hyun est resté impliqué dans le projet, notamment en cosignant le scénario pour en assurer la continuité narrative. En revanche, il a choisi de laisser la mise en scène à son jeune collègue afin de se consacrer pleinement à son propre nouveau film, The Good News — un thriller historique attendu sur Netflix… la semaine prochaine (17 octobre 2025).
Bref, autant Kill Boksoon m’avait, contre toute attente, séduit, autant j’ai sincèrement détesté ce spin-off que j’aurais pourtant voulu aimer. La rupture de ton, le manque d’expérience perceptible aussi bien dans la forme que dans le fond, et un scénario aussi inconsistant que futile au sein d’un univers pourtant prometteur m’ont fait amèrement regretter ma soirée « double programme » — ainsi que les heures de sommeil une fois de plus sacrifiées pour du pur vent. À vous de voir, maintenant, comment vous souhaitez investir votre temps…