En 1955, Marcel Pagnol est au sommet de carrière, aussi bien en tant que cinéaste et dramaturge, mais l'inspiration ne vient pas pour la suite. C'est alors que la rédactrice en chef du magazine Elle lui propose d'écrire des articles sur sa vie ; avec l'aide de sa représentation enfantine, il va revenir sur sa vie trépidante.
Après l'échec de Attila Marcel, son seul film en prises de vues réelles, il faudra attendre plus de dix ans (sauf quelques panouilles comme un gag dans Les Simpson ou l'introduction de Joker : folie à deux) pour que Sylvain Chomet revient au cinéma d'animation, et qui plus est par une célébration de Marcel Pagnol à l'occasion des 130 ans de sa naissance. C'est un biopic, pas vraiment hagiographique, qui revient sur les 60 premières années de sa vie, entre relations conflictuelles avec son père, sa mère qui décède alors qu'il était très jeune, sa découverte de la littérature, puis son voyage sur Paris où son talent de dramaturge va s'exprimer, puis le triomphe au cinéma... Le film est assez court, 90 minutes, il va très vite, d'une grande beauté plastique (on jurerait voir du dessin à la main), mais surtout, il y a une grande émotion pour qui connait l'oeuvre de Pagnol, car c'est carrément un bout de Provence qui vient à l'écran. Notamment toute la partie avec Raimu, un de nos plus grands acteurs, avec qui la relation amicale va devenir fusionnelle, soit orageuse, mais elle va donner lieu à cinq chefs d’œuvre absolus. On reconnait bien là chez l'acteur sa faconde, son tempérament explosif, mais également sa grande générosité qui le rendaient attachant au point que la scène de sa mort sonne comme une immense injustice. Il y a d'ailleurs quelque chose de très beau dans le film, qui est de l'animation ; ce sont les quelques extraits de ce qu'a réalisé Pagnol qui apparaissent en prises de vues réelles, ce qui donne l'occasion de revoir quelque scènes mythiques, et souvent avec Raimu.
Je suis lecteur de Pagnol depuis l'enfance, j'avais même vu en salles à l'époque La gloire de mon père avec le collège, et il y a une grande justesse dans l'histoire écrite par Chomet, ou tout y est juste. S'il pouvait se montrer volage, on voit aussi sa lutte contre le régime nazi durant la guerre qui va culminer avec la destruction des rushes de La piste aux étoiles en signe de protestation, mais aussi les moments de bonheur, dus à ses films, son amour avec sa dernière épouse, où la conclusion sonne comme une vie bien remplie, avec beaucoup de joie et quelques peines.
Comme on dit, j'étais à la maison en voyant le film, que je trouve formidable, et qui j'espère, donnera envie au public de (re)plonger dans l'oeuvre immense de cet auteur total.