Metropolis
8.1
Metropolis

Film de Fritz Lang (1927)


Metropolis (1927) faisait partie de cette longue liste de classiques qui manquent à ma culture cinématographique, néanmoins en ce qui concerne spécifiquement celui-ci, il ne m'était pas totalement inconnu, non pas grâce aux différentes images devenues iconiques qu'on a tous vus en sachant très bien d'où elles sont tirées, mais parce que je connaissais une version alternative, une version remontée, amputée de quelques scènes et débarrassée des différents panneaux textuels et autres indications scénaristiques, sur laquelle le producteur et musicien américain Jeff Mills a composé une nouvelle orchestration électronique et même techno, qui prend tout son sens à l'aune des thématiques qui infusent toute l'œuvre du musicien, à savoir le rapport de l'homme à la technologie et les questionnements sur le futur qu'ils soient optimistes ou pessimistes.


Il était donc plus que temps d'enfin regarder ce monument du septième art dans sa version initiale. Je n'ai nullement la prétention de me faire l'exégèse de tous les critiques, analystes et historiens du cinéma qui ont commenté par le passé cette œuvre fondatrice, ni même de me livrer à une analyse qui ne ferait que ressasser ce que des gens biens plus intelligents et légitimes que moi ont déjà dit. Je peux toutefois affirmer qu'à mes yeux et de façon absolument subjective, cette expérience a été véritablement passionnante.


J'aimerais cependant vous exposer ce que j'en ai compris, satyre sociale, dont le futurisme d'ordre science fictionnel qui caractérise ses décors, illustre le caractère déterministe et par conséquent inéluctable qu'il veut exposer et dénoncer. Fritz LANG à la façon d'un entomologiste scrute cliniquement les rapports verticaux qu'entretiennent depuis toujours les hommes, les relations de dominants et dominés, la hiérarchie arbitraire qui dessine les destins de chacun.


Traiter de cette lutte des classes par le biais de l'espoir induit dans sa théorie de l'automatisation et de la robotisation que serait le futur, qui mènerait l'humanité vers un avenir où elle serait libérée de ses chaînes d'esclave, me parait être à la fois émanant d'un cinéaste dont la vision ne peut être comprise autrement que comme nihiliste, pessimiste et sombre quant à la destinée humaine. Mais alors que notre société moderne s'enorgueillie d'être parvenue à cette utopie du tout robotisé qui loin d'avoir supprimé les rapports verticaux entre masses laborieuses et élites bourgeoises à au contraire créé d'autres rapports de dépendances et de servilités où les gagnants ou les privilégiés restent les mêmes, conférant à l'ensemble en sus de son pessimisme une aura prophétique troublante.


A l'instar d'une vision marxiste de la société, la fatalité ne pourra dès lors n'être remodelée que par une grogne sourde, une révolte totale ou peut-être pour conserver une lueur d'optimisme par le truchement d'un amour qui ici revêt dans ce que j'en ai compris et perçu le rôle du transfuge de classe qui prendrait conscience de l'existence d'un monde à la fois parallèle au sien, mais inextricablement liés.


En résumé un chef d'œuvre dont la réputation n'est nullement usurpée ou exagérée qu'il faut absolument voir une fois dans sa vie, un indispensable à toute construction cinéphile ou d'ordre culturelle et pour revenir à la version alternative exposée en introduction, l'album de la bande originale composée par Jeff Mills vient d'être éditée en vinyle et il existe une version DVD de sa relecture que je vous conseille aussi en supplément de l'original.

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