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J'ai toujours aimé les longues scènes de silence, où les plans parlent avec des images, et nous mitraillent de non-dits et de mystères. L'ouverture, assez longue et magistrale en ce sens, de Nocturama, dans le métro parisien, est quelque chose qui m'avait rappelé une scène de crime, silencieuse aussi, dans le métro parisien chez Wim Wenders, dans L'ami américain. Là c'était encore plus long et encore plus complexe !

J'aime ce qui s'oppose aux codes, ce qui défie artistiquement les lois. Avec ces jeunes révolutionnaires j'étais servi. Un peu les mêmes que La crème de la crème. L'errance dans le grand magasin me rappelait celle, involontaire et naïve, de Bébert avant qu'il ne sème la panique dans l'omnibus (train et grand magasin font bon ménage au cinéma) et celle de Charlot dans Les temps modernes, plus anarchiste. Il y avait dans ce magasin désert, un danger semblable à celui qui rôde dans les couloirs du vaisseau d'Alien, ou dans les couloirs de l'hôtel de Shining (la réécriture du tricycle du petit garçon en kart chez Bonello à confirmé mon intuition). Dans la dernière partie du film, la traque des CRS dans le magasin plongé dans le noir, qui n'ont pas besoin d'arrêter les "ennemis d'état" et peuvent simplement les abattre, je me suis cramponné à mon siège, comme ça avait pu arriver dans le labyrinthe de Shining, dans le vaisseau d'Alien ou dans le film Detroit de Kathryn Bigelow, insoutenable et cathartique (à cela près qu'ici, au moins, les jeunes étaient coupables de ce dont on les accusait). Oh, que j'aime les grand huis clos !

La parole servait à demander de l'aide, et elle n'était pas entendue... Alors à quoi bon parler ! Le silence, dans la pesanteur qu'il peut porter, est une souffrance. Et la musique qui vient le recouvrir n'est qu'un divertissement. Telle fut pour moi l'esthétique du film (qui aurait cependant pu détruire un peu plus encore les normes esthétiques, salir un peu plus l'image, la renverser, la secouer davantage pour être un peu moins spectaculaire et un peu plus révolutionnaire !).

Dormir_Debout
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le 29 mai 2023

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