Un jour dans une vie, ce n’est peut être pas grand chose, mais c’est souvent assez pour refléter une époque, une étape, un état d’esprit. C’est aussi une chanson des Beatles, « A day in the life », dont Jan Ole Gerster s’est inspiré pour écrire Oh Boy et dont les paroles ont même donné le nom du film. En partie autobiographique, celui-ci retrace la journée de Niko, quasi trentenaire, pas encore tout à fait prêt à renoncer à son adolescence et les rêves qui l’accompagnent. Niko est affecté par un mal résolument moderne : cette peur de passer à côté de sa vie, de s’enfermer dans une voie qui ne serait pas la bonne. Alors il prend son temps, il réfléchit. Si tout autour de lui semble évoluer assez vite, lui, au contraire, se laisse porter par les évènements. Il ne s’impose rien. Mais cette journée ne va pas se passer sans encombres.

D’entrée, Oh Boy se démarque par le choix du noir et blanc. Un pari osé qui semble ici en totale adéquation avec le personnage de Niko. Car Jan Ole Gerster a su trouver le ton idéal pour raconter cette errance, à la fois drôle et sensible. Le réalisateur allemand prouve également qu’il n’a pas peur de se confronter à l’Histoire de son pays et opte pour un second degré d’une finesse remarquable. Il prend plaisir à croquer ses différents personnages, aux travers parfois pathétiques mais dont on parvient à sourire aisément. Sans doute parce que Jan Ole Gerster aime profondément ses protagonistes. Si ces rencontres et les péripéties qu’elles engendrent peuvent a priori paraître anecdotiques pour Niko, elles en disent finalement beaucoup sur le rapport aux autres, notamment ce passé qui nous hante et dont on parvient difficilement à se défaire. Sans en faire une succession de saynètes, le jeune réalisateur parvient à faire évoluer l’état d’esprit de son personnage. Le tout sur une bande originale jazzy qui donnerait même au film de faux airs Alleniens.

En signant un long-métrage très contemporain, ancré dans la réalité, Jan Ole Gerster prend soin de ne pas faire tomber son personnage dans une prise de conscience rédemptrice. Il ne cherche pas à expliquer quoi que ce soit. Il dresse simplement le portrait d’un jeune homme d’aujourd’hui. Néanmoins, pour réussir un tel film, il fallait avant tout trouver un acteur capable de provoquer une certaine empathie et auquel on puisse facilement s’identifier. C’est chose faite grâce à Tom Schilling, véritable alter ego du réalisateur, qui avec ses airs de loser sympathique, nous touche immédiatement. Avec talent et humour, Jan Ole Gerster parvient à capter l’air du temps, comme trop peu de cinéastes réussissent aujourd’hui à le faire.
Leaf
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le 14 juin 2013

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