Avec A Quiet Place, le plaisir est double : d’abord parce qu’il s’impose avec brio dans le genre de l’épouvante, sans en dépendre totalement, ensuite car la présence de John Krasinski devant et derrière la caméra surprend en bien, le spectre du mastodonte The Office (registre ô combien distinct) s’effaçant en un claquement de doigt... discret.

Aux côtés d’Emily Blunt, le couple à la ville incarne une paire de parents tâchant de survivre dans un monde postapocalyptique, la faute à des prédateurs venus d’ailleurs : avec leur brochette de gamins à protéger, la tâche s’annonce ardue à mesure que nous sont dévoilées les spécificités des bestioles, invulnérables de leur état et dotés d’une ouïe sans équivalence.

Sans révolutionner le genre, convenons que le scénario signé par Krasinski et la paire Beck/Woods est des plus malins et respectueux de son potentiel (et donc, par voie de conséquence, du spectateur) : avec pour fondamentaux le silence en gage de survie et un bruit couperet, A Quiet Place accouche d’un récit suffisamment original dans la forme et le fond, sa violence viscérale et non-feinte entrecoupant de longues plages de quiétude teintée d’angoisse.

Entre séquences contemplatives, propices au développement astucieux de ses personnages, et horreur inéluctable à la moindre erreur, le long-métrage parvient à développer une atmosphère mouvante : exception faite de poncifs évitables (favorables à des sursauts convenus), la tension se veut constante et diablement captivante, d’autant que l’introduction mémorable attestait des prétentions de Krasinski et consorts, la mort pouvant frapper n’importe qui.

Certes, et ce n’est guère étonnant, A Quiet Place n’est pas exempt de tout reproche, qu’il s’agisse d’une prévisibilité presque assumée (le fait que Beau ferme la marche était des plus annonciateurs) ou de raccourcis alimentant une terreur déjà suffisamment alimentée (la monstruosité débarquant dans le refuge insonorisé). Pourtant, dans le même temps, le film nous enjoint à lui pardonner ses écarts : bien que pressenti, le sacrifice du Père s’avère poignant à souhait, tandis que la crainte d’un abus (et donc d’une trahison) de son concept « sonore » n’aboutit jamais, quand bien même la brave Evelyn devrait accoucher dans les pires circonstances qui soient.

Fort de sa cellule familiale attachante (superbe distribution), d’un enrobage formel discret (mais irréprochable) et d’un postulat riche en idées de mise en scène, A Quiet Place nous laisse donc une bien belle impression : jamais (ou alors très peu) facile, il compose un divertissement rythmé à la perfection (seules les dernières minutes frôlent la rallonge) dont les composantes passées (origine des affreux, ou du moins de leur arrivée en fanfare) et futures (quel avenir pour les Abbott ?) ne peuvent que nous laisser songeur... il va donc sans dire que le second opus sera visionné sans rechigner !

NiERONiMO
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le 18 août 2022

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