Sirāt
7.2
Sirāt

Film de Oliver Laxe (2025)

Voyage mystique en panne d’essence

Si on me donne une recette avec un désert qui vous assèche la gorge, des vieilles voitures qui foncent dans l’infini, de la techno bien léchée et des acteurs aux gueules singulières, je me dis : ça va être une putain d’aventure.

Et pourtant, la sauce ne prend pas. Je ne pense pas avoir été le seul à me sentir laissé sur le bord de la route, quelque part dans le Reg marocain (merci les mots fléchés), et j’avais envie de poser quelques mots là-dessus.


Sirat aurait pu me prendre en stop immédiatement : la scène d’ouverture m’a accroché d’emblée. Elle est réussie sur tous les plans, alternant contemplation des montagnes de sons dominants, une foule en transe, et posant une ambiance mystique prometteuse. Mais dès que la confrérie techno prend la route, expulsée manu militari par l’armée marocaine, le charme s’évapore peu à peu, entre nombreux fondus enchaînés de couchers de soleil et plans de route qui défilent à toute vitesse.


Certains encenseront sans doute les acteurs quasi-amateurs. Pour ma part, je n’ai pas réussi à entrer dans leurs vies singulières. Leur jeu, souvent trop distant de l’action, associé à des dialogues creux et parfois caricaturaux (cf. « Merde LSD »), m’a empêché de m’attacher aux relations qui se nouaient. C’est peut-être là le point fondamental qui m’a manqué.

J’ai également cherché à comprendre les différentes symboliques : cette confrérie d’estropiés fuyant un monde en guerre, cette fille qui disparaît, son étrange ressemblance avec une connaissance des teufeurs… Mais trop de portes s’ouvrent sans jamais trouver de suite. Mines, guerre, disparition : tout semble relever d’un tour de magie qui donne l’illusion d’une symbolique puissante et nébuleuse, mais qui m’a laissé sur le bas-côté.

La scène choc du film tente de ranimer les spectateurs épuisés par ce long (et ennuyeux) trajet, mais le sursaut reste bref. La séquence suivante, dans un champ de mines, m’a paru simpliste pour tenir le spectateur en haleine, marquant la fin du voyage avant un ultime échappatoire : une voie ferrée, qui clôt le film de manière plutôt molle.

Au final, j’ai surtout perçu dans Sirat une sorte de culte de l’exotisme, à deux niveaux : d’abord dans le choix du décor, un désert vidé de toute présence, correspondant à une vision fantasmée ; ensuite dans la représentation des teufeurs, probablement méconnus du grand public et de la critique cannoise. Celle-ci s’est sans doute réjouie de découvrir, au grand jour, cette« espèce » inconnue.

Leo_Printemps
5
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le 26 sept. 2025

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3 j'aime

Leo Printemps

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