Quatrième long-métrage d'Emmanuel Mouret, Un Baiser s'il vous Plaît garde les défauts de ses prédécesseurs et confirme les errances en libertinage du jeune réalisateur français qui s'enferme dans un style par trop classique pour séduire largement et faire écho. Cinéma léger et inconséquent,



obsession lassante et obsolète pour les jeux de l'amour et de la séduction,



on finit ici par subir l'impression d'une œuvre refermée sur elle-même, engluée et incapable de s'émanciper de ses influences.


Ici la nouveauté est à l'écriture avec une intrigue en tiroirs : une femme refuse un baiser à un homme et, pour se justifier, lui raconte les mésaventures d'amis qui ont eu le tort de se rapprocher plus qu'ils ne l'auraient dû. Si le réalisateur évoque volontiers Diderot lors d'une interview pour la structure libre de son film, ce sont bien Marivaux d'un côté, Choderlos De Laclos et autres romanciers libertins de l'autre qui font le cœur du récit : manipulations hasardeuses, plaisirs égoïstes, il s'agit avant tout d'une représentation quasi théâtrale afin de se mettre en garde contre les inconséquences sentimentales – sans grand sérieux d'ailleurs puisque le final du métrage s'amuse encore d'un ultime retournement de situation languide. L'autre faiblesse réside dans la justesse des échanges et Rohmer encore une fois est convoqué tant il semble qu'Emmanuel Mouret ne sache écrire un dialogue sans s'en inspirer, toujours à la manière de.
Casting agréable mais déséquilibré, la distribution ne sauve pas le film. Tout à l'urgence de prendre le devant de la scène, Emmanuel Mouret sacrifie ainsi le talent de Stefano Accorsi avec lequel il aurait été bien inspiré d'échanger son rôle : le réalisateur n'est pas mauvais comédien mais la convocation de bien meilleur que lui pour un personnage finalement mineur choque, déçoit. Julie Gayet, narratrice parfois à l'image parfois off, malgré ses douceurs et ses sourires, n'émeut guère. Frédérique Bel, après la belle performance du film précédent, se retrouve à sous-emploi, presque délaissée. Seule Virginie Ledoyen est filmée, mise en valeur, dénudée, pour habiller un personnage somme toute frivole et pour qui, malgré sa beauté engageante, on n'a que peu de considération tant



les questions que le duo se pose paraissent futiles et vaniteuses.



Une technique générale moins aboutie, moins pensée probablement, rapproche l'objet d'un vaudeville capté sans écriture et, hormis la présence intéressante de musique classique à quelques moments importants, rien réellement ne fait œuvre de cinéma. Fixe, lent, sans imagination ni inventivité : on s'ennuie.


« Avant qu'un baiser soit donné, on ne peut pas savoir s'il sera petit
ou grand. »



Malheureusement, au fur et à mesure que je découvre le travail d'**Emmanuel Mouret**, je commence de préjuger de son faible intérêt, de ses petitesses et de son manque d'envergure : le jeune homme se présente là comme un auteur du libertinage, de l'inconséquence, de la frivolité et ceint l'ensemble dans une forme désuète empreinte de dialogues et de quêtes obsolètes. Ne se lassant pas des hommages à une littérature poussiéreuse et à un cinéma qu'il admire mais n'égale jamais, Emmanuel Mouret se montre alors 


incapable de saisir les modernités de son époque,



autant que ses enjeux, et livre un triste cinéma de l'entre-soi.

Créée

le 10 janv. 2021

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