Bill a un petit tatouage sur la joue, un sobre trait noir en forme de cœur fissuré. Ce détail physique n'est pas anecdotique, nous allons suivre des personnages au cœur brisé, des adolescents avec des problèmes d'adultes ou abandonnés par les adultes : trouver un boulot (souvent des plans foireux et mal négociés), s'occuper de ses enfants (Bill en a deux, déjà), essayer de mûrir mais aussi de s'amuser un peu... Entre insouciance et maturité précoce, l'ambiance est d'office ambigüe, dès le territoire autochtone amérindien et jusqu'à la fête d'halloween finale. Matho, 12 ans, quasi abandonné par son père et entouré de ses amis, essaie d'être clean, mais la vie est rude, son visage est déjà balafré. On suit ces deux garçons en chassé croisé. Tous les jeunes, même secondaires, sont marginaux et mal à l'aise, dans cette situation identique d'abandon social. L'esthétique du film, claire-obscure, reflète ces malaises tragiques et le film revêt sa mélancolie juvénile à merveille, avec des touches de gaieté et de court bonheur, car ces cœurs brisés ne demandent qu'à être recollés... Le film, d'ailleurs, finit par recoller ces deux garçons l'un à l'autre, dans le paysage matinal en clair-obscur et une ambiance aigre-douce. L'aigre douceur, c'est cela qui gouverne le film de bout en bout, et c'est d'elle qu'émane son charme puissant (les acteurs sont magnétiques dans leur simplicité). War pony, Caméra d'or au festival de Cannes 2022, est un des plus beau film sur l'adolescence de ces dernières années (à côté de Licorice pizza et Armageddon time, qui arrivaient eux aussi à faire jongler le doux et l'amer et à réparer les cœurs ébréchés).

Alfred_Babouche
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Top te(e)n movies USA

Créée

le 6 août 2023

Critique lue 6 fois

Alfred_Babouche

Écrit par

Critique lue 6 fois

D'autres avis sur War Pony

War Pony
Aude_L
6

L'Indien Marlboro

Que reste-t-il des amérindiens aujourd'hui ? Qu'est-ce que l'appartenance à un clan, une famille, un pays ? War Pony questionne son sujet avec une pertinence et une clairvoyance qui nous font passer...

le 18 janv. 2023

12 j'aime

War Pony
Floridjan
7

Caméra d'or méritée

C'est un film étrangement beau, étrangement dur, étrangement triste, étrangement poétique, pas complétement désespéré, y a parfois presque une lueur d'espoir à l'horizon du Dakota.Le cinéma US...

le 15 mai 2023

11 j'aime

3

War Pony
Cinememories
6

En auto-stop

Si l'aura d'Elvis tourne autour du biopic attendu sur la croisette, il ne faudrait pas négliger la présence de sa petites fille, déjà connue à l’écran et qui fait son incursion dans la réalisation...

le 28 juil. 2022

5 j'aime

Du même critique

J'accuse
Alfred_Babouche
8

Zola et Polanski

La faute de l’abbé Mouret. Roman Polanski est un gros dégueulasse. Roman Polanski est aussi un immense réalisateur (The Ghostwriter, Rosemary’s baby, The Pianist). A l’époque de Zola, le célèbre...

le 15 nov. 2019

6 j'aime

3

Mademoiselle de Joncquières
Alfred_Babouche
8

La religieuse ou la putain

Sans connaissance de l'oeuvre de Monsieur Mouret, ni du roman de Monsieur Diderot dont seul le titre m'était familier c'est plutôt Monsieur Baer qui m'a attiré vers le cinéma. J'avais envie qu'il me...

le 19 sept. 2018

4 j'aime

1

L'Effondrement
Alfred_Babouche
8

De l'Homme au singe

L’effondrement – série créée par Les Parasites: Y a-t-il toujours un pilote dans l'avion ? A la fin de La Haine (Kassovitz, 1995), la voix grave du narrateur conclue le film en déformant légèrement...

le 9 sept. 2020

3 j'aime