Catherine: Full Body
7.6
Catherine: Full Body

Jeu de Studio Zero et Atlus (2019PlayStation 4)

« Ce qui est formidable dans la vie, c’est que vous pouvez faire ce que vous en voulez »

Alors que Catherine fut une proposition de jeu de réflexion narratif singulière avec ses belles réussites sur la septième génération de console, Atlus lui fait refaire surface 8 ans plus tard à la suprise générale. A proposition singulière, remake singulier, là où tout le concept narratif du jeu de base reposait sur la dualité entre deux personnages appelées Catherine, une troisième débarque dans ce nouveau récit pour chambouler tout ça. C’est un choix qui me semblait très curieux mais comme ce sont les mêmes développeurs et que Catherine méritait bien quelques améliorations dignes d’un remake, j’avais envie d’y croire.


L’ajout de Rin est une idée à l’exécution à la fois :


- Pertinente et maladroite :
Elle prend une telle place dans le récit avec notamment cette excellente idée de l’associer aux mécaniques de jeu des puzzles qu’elle éclipse un peu trop les deux autres personnages. On sent bien que Rin apporte quelque-chose et n’est pas de trop, sa personnalité bienveillante et tolérante à l’extrême est bien une proposition alternative à l’ordre et au chaos, en l’occurrence l’harmonie. Mais elle a été intégrée à tout ça de façon trop importante et déséquilibrée à mon sens, elle est d’une aide précieuse à Vincent là où les autres sont surtout anxiogènes, de par le concept même du jeu.


- Osée et frustrante : (spoiler massif en approche)


Le fait que Rin s’avère être dotée d’un pénis constitue un twist d’une brutalité incroyable et un tel choix de romance aussi subversif témoigne d’une audace tout aussi incroyable. D’un côté, ça permet d’amener le message d’ouverture d’esprit par cet arc narratif à un très haut niveau, puisque le joueur doit être aussi tolérant que l’intrigue l’exige du personnage. D’un autre côté, pour peu qu’on soit un joueur qui a réussi à s’investir émotionnellement dans cette intrigue, un tel twist peut facilement remettre en cause cet investissement et briser l’immersion de par le fait que cette révélation est très tardive et peu amorcée. Ça ne m’est pas arrivé finalement mais c’était pas si loin que ça tout de même de me gâcher l’expérience.


- Réussie et manquée :
Plusieurs chapitres sont complètement revus pour Rin et comporte leur lot de fulgurances d’une très belle intensité. Rin est à l’origine de situations comiques bien amusantes, de moments de mélancolie très appréciables, de moments de bravoure bien épiques… Mais d’autres passages la concernant ne sont pas toujours réussis et globalement je trouve qu’elle se répète beaucoup dans ses phases de discussion les plus annexes, pour un personnage inédit central, peut-être aurait-on pu espérer une qualité d’écriture encore supérieure, mais c’est vrai que la barre était haute.


Pour conclure sur cet arc narratif inédit, sans doute l’élément le plus important de cette nouvelle version d’une part, trop de nuances propres à ce nouvel arc pour en faire un atout de premier choix, d’autre part trop de qualités pour en faire un défaut à relever, Rin est donc aussi bouleversante que le jeu lui-même et pour mon avis à son sujet. Enfin, le côté très WTF de sa fin, sans en dire davantage, fonctionne très bien avec le ton décalé de l’ensemble de l’œuvre, sans y adhérer tout particulièrement, ça ne m’a pas dérangé plus que ça vu toutes les excentricités du jeu de base.


Pour en terminer sur la partie scénaristique, les différentes scènes inédites venant enrichir les arcs de Catherine et de Katherine sont plutôt réussies dans l’ensemble à mon sens, fidèles à l’état d’esprit original et certainement pas inutiles, comme les quelques arc narratifs secondaires supplémentaires. J’apprécie notamment les scènes flash-back qui rendent le personnage de Katherine moins anxiogène, même si je suis parfaitement conscient que certains puristes préféreront le parti pris initial plus radical. Le plus grand choix alloué dans la rédaction des SMS est également un ajout discret relativement appréciable.


La proposition remix, apportant des cubes inédits aux configurations déjà existantes, est une idée assez ingénieuse pour inclure suffisamment de variations aux puzzles originaux pour le joueur en quête de nouveautés sans avoir représenté une remise en cause trop profonde de ces niveaux qui sont toujours jouables dans leur version originale pour les intéressés. C’est dommage que ça implique moins de solutions possibles, mais c’est également intéressant comme approche, d’autant que sa dimension facultative est des plus pertinentes.


La difficulté adoucie à bien des égards pour un même niveau de difficulté retenue, notamment par le temps supplémentaire alloué, mêlé à des options d’ergonomie comme la possibilité de skipper les situations de jeu déjà passées en cas de retrys trop nombreux, rendent l’expérience beaucoup plus accessible et agréable. Je suis pourtant à la recherche de challenge de manière générale, mais la version originale imposait une difficulté trop élevée à mon sens et c’est un sacré reproche que je faisais au titre original qui est ici parfaitement corrigé, peut-être la plus grande plus-value que j’accorderai à cette version.


Les musiques inédites composées pour l’occasion sont excellentes et parfaitement dans le prolongement logique de l’OST originale, mention spéciale à la reprise de la chevauchée des valkyries, un grand classique qui manquait à la sélection. C’est d’autant plus à noter que les nouveautés de cette version accordent une plus grande importance à la musique dans l’expérience de jeu et dans le propos développé, une bien belle chose. L’enrichissement du Juke-box par l’extrait d’autres OST de jeux Atlus, notamment des productions plus récentes, constitue un ajout sympathique également.


Pour la technique, si l’impossibilité d’afficher de la 4K semble regrettable de prime abord, l’extrême soin accordé à l’antialiasing permet à Full Body d’être un véritable ravissement pour les yeux et d’offrir au titre une version parfaitement aboutie sur le plan technique. Les 30 FPS sont amplement suffisant à mon sens pour ce type de jeu et j’apprécie les cinématiques comme étaient à l’époque. Je ne vois donc aucun reproche à adresser au titre de ce côté sans non plus pouvoir en faire des éloges dithyrambiques.


Pour l’esthétisme, le chara-design remplit parfaitement son office pour les personnages inédits, Rin en tête, j’apprécie l’éclairage modifié pour rendre le bar plus chaleureux, c’est ce qu’il est censé être à mon sens, et avoir diversifié les alcools et les anecdotes n’est pas un choix que je regrette. Le plus notable à ce sujet, c’est le travail sur les environnements inédits pour les quelques niveaux tout aussi inédits, au niveau de qualité des meilleurs environnements du jeu original, la barre était pourtant haute là aussi et pour le coup Full Body a su être à la hauteur du défi.


Catherine Full Body est à la version originale une version enrichie satisfaisante sur la plupart des aspects, salvatrice sur sa gestion de la difficulté et surprenante sur le point le plus central à son expérience de jeu : l’ajout de l’arc narratif de Rin qui manque de maîtrise et peut s’avérer frustrant et maladroit tout en étant terriblement audacieux et rempli de bonnes idées. J’ai donc beaucoup de mal à me positionner sur ce titre que je préfère peut-être à la version originale mais insuffisamment pour lui accorder une note supérieure, une bonne curiosité dans tous les cas de figure, comme à l’époque.

damon8671
7
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le 14 déc. 2020

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damon8671

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