Sept ans de production c’est long et la quasi absence de communication de la team cherry a créé une certaine forme de folie collective. Le cerveau humain n’aime pas le vide c’est scientifique, alors s’ils ne communiquent pas internet s’en chargera (malheureusement). Plus le temps passait et plus les théories se voulaient pessimiste. Si c’est si long c’est que forcément ça se passe mal, surtout dans une industrie du jeu vidéo aussi moribonde. Finalement il n’en était rien. Le toujours bien renseigné Jason Schreier ayant pu s’entretenir avec l’équipe a révélé dans les colonnes de Bloomberg que si le développement a été si long c’est simplement parce que… L’équipe bosse de façon « lente », ils sont petits et faire un jeu ça prend du temps. Bref beaucoup de bruits pour une chute on ne peut plus banale. 1+1=2, l’eau ça mouille etc… Le succès du premier opus leur ayant permis d’avoir une assise financière confortable (15 millions d’exemplaires depuis 2017 !), ils ont pu travailler sur cette suite de façon sereine mais pas sans pression. Bien conscient du statut désormais culte d’Hollow Knight et devant l’hystérie d’une fanbase inondant de messages « SILKSONG » à chaque nintendo direct ou autre conférences du jeu vidéo, la pression était probablement bien la. C’est un vrai dilemme de créatif : Comment succéder à un tel succès à fortiori quand il s’agissait de leur toute première œuvre ?
D’abord DLC puis jeu à part entière pour enfin devenir arlésienne et même des internets, Hollow Knight Silksong est enfin sorti le 04 Septembre 2025. On enlève les masques de la clown troup, on supprime les mêmes de nos téléphones et on lance enfin l’aventure Silksong en ayant toujours autant de mal à y croire.
Il me parait malheureusement écrit d’avance que cette suite ne pourra jamais faire autant consensus que son prédécesseur, quoi qu’elle fasse et peu importe ses qualités. Trop d’attentes, trop d’espérances, trop de bruits. Il est facile d’en avoir oublié que la promesse initiale de Silksong est simplement d’être la suite d’Hollow Knight avec tout ce que cela comprends de sensation familière et donc d’absence d’effet de surprise. A attentes démesurées, réactions démesurées. Ainsi une difficulté un cran plus élevée devient défi insurmontable. Une maniabilité différente devient un gameplay imprécis. Une suite aussi qualitative soit-elle devient un 1.5.
Moi-même étant fan assez hardcore du premier (3éme place de mon top 10 jeu vidéo alors que je joue depuis presque 30 ans déjà…) j’ai tenté autant que possible de tempérer mes propres attentes. Un week end de 4 jours programmés pour lui consacrer un maximum de temps et j’en ressors tout simplement émerveillé.
Dans un jeu de miroir opposant la descente vers les Abysses à l’ascension vers la citadelle, Silksong joue à la fois les cartes de la différence et de la familiarité. La froideur mutique du petit knight laissant place au tempérament incandescent et assuré d’Hornet dans une aventure retorse où presque tous les curseurs semblent avoir été poussés d’un cran. Une carte plus grande, plus d’ennemis, plus de patterns, plus de pièges et plus de moiteurs des mains.
Car oui, Silksong se veut être une expérience plus corsées que ne l’était le premier HK. Dans ce dernier, pas mal de petites astuces pouvaient « faciliter » le jeu. Le coup vers le bas permettant de rebondir notamment, qui avec de la pratique, était un vrai game changer. C’était totalement voulu par la team cherry et j’en veux pour preuve l’infâme 3éme défi du colisée qui demandait à un moment de se battre sans toucher le sol. Hornet possède également une attaque vers le bas mais il s’agit d’une attaque en piqué oblique. Ça n’a l’air de rien mais c’est un vrai coup à prendre à fortiori quand la course de cette attaque est relativement courte. On le comprend à la dure lors des phases de platforming reposant sur cette mécanique et le rebond qui en découle. Même chose avec le dash. Celui du Knight était parfaitement horizontal. Hornet, elle, fait une sorte de salto avant pas tout à fait droit et ça bouscule pas mal les habitudes quand on a fait le premier plusieurs fois. Car finalement si le petit héros d’HK se déplaçait de façon très longiligne, en forme de croix, Hornet a un gameplay bien plus aérien et courbé. Elle peut par exemple se cramponner aux rebords des plateformes ce dont été incapable le petit Knight. Cependant rien n’est gravé dans le marbre car certains équipements peuvent changer le move-set d’Hornet pour quelque chose de plus familier mais je n’en dirai pas plus.
On constate également que les frames d’invincibilité après avoir pris un dégât ont été énormément raccourcis. Il est donc facile de se faire complètement anéantir si on ne réagit pas rapidement car on le rappelle ce sont des jeux dans lesquels il y a des dégâts de contacts. Ajoutons à cela un bestiaire particulièrement retors, moins prévisible et avec plus de patterns. Les ennemis de base ont des façons de se mouvoir plus complexes à prévoir, ils peuvent reculer, sauter en arrière pour se replier et même passer a travers les plateformes pour vous rejoindre pour certains ! Les boss profitent aussi de ce nombre de pattern accru en se payant le luxe de très rapidement faire des doubles dégâts (ce qui était bien plus rare dans le premier et plutôt réservé à l’annexe / post game). Vous en voulez encore ? Ils ont même foutu des pièges environnementaux pour vous surprendre. Je préfère ne pas trop en dire tant certains sont vicieux… Pour ceux ayant fait le jeu :
(les bancs piégés… sérieusement bande de petits vicelards ???).
La gestion du soin est également à double tranchant. Il nécessite une jauge de soie pleine, redonne 3 points de vies mais si on est interrompu on perd à la fois la vie et toute notre soie pouvant mener à une situation catastrophique et une mort quasi assurée. Même le platforming est un cran au dessus niveau exigence. Tout les dangers, tout les défis se sont vu rehausser afin d’offrir un joli challenge même aux vieux de la vieille quitte à probablement sacrifier les nouveaux venus au passage. Nous ne sommes jamais à l’abri d’un patch pour adoucir tout ça mais en l’état difficile de recommander Silksong à quelqu’un qui n’aurait pas roulé sa bosse sur le premier… Ne vous moquez pas de mes expressions de vieillards je vous vois !
MAJ : Un premier patch est déjà venu corriger quelques passages ardus, baisser les prix exorbitants de certains objets et augmenter quelques récompenses. Bref je ne vais pas m’étaler sur ce premier équilibrage qui est d’ores et déjà caduc. J’espère néanmoins que la difficulté restera assez présente et que seuls les passages vraiment exagérés seront concernés par ces retouches. Je pense à une arène sur la fin du jeu vraiment infecte notamment… Du coté des boss j’ai trouvé l’ensemble déjà bien équilibré.
Même en termes de philosophie d’exploration, Silksong est un peu différent. Les récompenses octroyées par un ratissage minutieux des lieux se veulent moins régulières et moins clinquantes. Cela s’explique par le système de build qui délaisse la profusion des charmes pour quelque chose qui fonctionne plutôt par archétypes, j’y reviendrai. Bien conscient de l’attrait qu’avait généré le Lore d’Hollow Knight, il n’est pas rare qu’un passage secret vous offre simplement quelque chose à lire ou la présence d’un personnage venant expliquer le fonctionnement de la zone par exemple :
(l’usine et la créature travaillant sans cesse dans l’espoir d’être accepté dans la citadelle).
La récompense peut bien souvent n’être que de la monnaie du jeu (les perles). Ainsi les objets importants se veulent plus rare mais aussi plus précieux. Difficile cependant de nier que cela pourrait démotiver les moins investis à fouiller de fond en comble pour ne trouver que quelques perles 9 fois sur 10. C'est pourtant comme ça que l'on découvre de nombreuses zones cachées non obligatoires à la trame principale. J’en ai trouvé une totalement par inadvertance et j’aurai tendance à y voir un petit clin d’œil à Bloodborne…
(en me faisant tuer par un ennemi qui tente de vous enfermer dans une cage, cela vous amène dans une prison « le bloc » où vous n’avez plus vos items et devez vous échapper. Idée brillante !).
Une des grandes nouveautés réside dans la présence de quêtes annexes. C’est quelque chose d’assez peu commun dans un metroidvania et cela consistera à abattre un certains nombres d’ennemis ou retrouver des PNJ perdus entre autre. Bilan mitigé pour cette feature mais c’est assez bien intégré à l’aventure alors après tout pourquoi pas.
Hornet pourra s’équiper de « masques » aux effets différents. Dans ces masques un certains nombres d’emplacements sont disponibles. Certains masques offrent plus d’emplacements de tels ou tels types et par conséquent ils orientent certaines typologies de builds. Préférez-vous avoir plus de charmes ou plus d’outils ? Oui tiens parlons en d’ailleurs. Le gameplay d’Hornet est notamment basé sur l’utilisation d’outils qu’elle peut utiliser au combat. Des projectiles par exemples, à la manière de Kunai lancés face à elle. Leur utilisation utilise une ressource appelée les éclats d'os que l’on récupère sur chaque ennemi vaincu, comme les géos du 1 mais qui ici ne servent qu'à la fabrication d'outils. En s’asseyant sur un banc, Hornet re-fabrique automatiquement ses outils manquants en piochant dans cette ressource. Pour clarifier le propos il y a donc 2 "monnaies" dans Silskong. Les perles à échanger aux marchands et les éclats d'os qui servent à remplir le stock d'outils. Certains ennemis en lâchent l'une, l'autre ou les deux.
Techniquement et artistiquement une fois encore c’est un enchantement. Rappelons que tout est fait à la main et lorsque l'on voit la superficie du jeu ça force l'admiration. On sent même que la team cherry a peaufiné son art et ça se joue dans les détails. Décors plus fins, arrières plans plus fournis, plus animés, effets de particules sous les pas de notre héroïne etc… Je suis pour ma part complètement amoureux de leur D.A. Je pense même que je n’avais pas eu une telle admiration d’un rendu graphique depuis Okami. C’est typiquement le genre de direction artistique qui ne vieillira jamais peu importe les avancées technologiques.
Quant à la musique de Christopher Larkin elle est une fois encore riche en motifs propice à l’évocation. La bande son propose même des thèmes musicaux évolutifs qui gagnent en intensité et en volume à mesure que l’on progresse dans notre ascension. L’aspect religieux prépondérant de Pharloom offrant un cadre idéale pour des thèmes solennels. On retrouve évidemment d’autres mélodies plus mélancoliques pour habiller des lieux désertés ou chargés en histoire. Quant aux musiques de boss elles sont évidemment épiques à souhait comme l’avait démontré le thème du personnage de Lace révélé en amont. Une des grandes bande son de l'année sans contestation possible.
Maintenant que j’ai bouclé le jeu (en fait je n'ai pas été battre le boss de fin car je ne me sent pas prêt à tourner la page) je n’ai qu’une envie : regarder des gens y jouer. Des personnes qui le découvriraient, d’autres qui commenceraient à bosser leurs speedruns en trouvant toute sorte d’optimisation. Le temps va passer et de plus en plus de petites astuces vont être trouvées et révélées rendant ce boss si difficile bien plus facile, ce power up accessible plus tôt, ce chemin optimisé pour arriver plus vite à cet autre endroit…Si cette contrée dégage moins de mélancolie que le royaume d’Hallownest elle provoque pourtant autre chose de tout aussi fort… Ce long chemin de pèlerinage jonché d’embuches s'est révélé étrangement vivant, rempli de personnages hauts en couleurs. Découpée en étapes, rempli de rencontres, l’aventure Silksong confirme que Hollow Knight n’était pas un coup de chance. La Team Cherry est une équipe qui sait ce qu’elle fait, qui a sa propre patte et qui prend plaisir à créer. Tout transpire l’envie de bien faire et de donner toujours plus (pour seulement 20€ c’est scandaleux !). Silksong réussit à tenir la comparaison avec Hollow Knight mais aussi à exister à part entière, à avoir sa propre identité. Le plus beau c’est qu’il ne rend pas obsoléte ce dernier et vient se placer à ses cotés. L’exploit a été répété de façon fort intelligente.
Vous savez quoi ? Je ne quitterai pas Pharloom. A moins que ce ne soit Pharloom qui ne me quitte pas... Car il y a des aventures que l'on oublie pas. Des lieux de jeu vidéo si fort qu'ils s'incrustent en nous. Un détour par les trophées du jeu m’a confirmé que j’avais encore des secrets à découvrir… Rien ne pouvait me faire plus plaisir. Si vous me cherchez je serai la bas, au milieu de tout ces petits personnages, à explorer. Et lorsque je sentirai que le moment sera venu, j'irai affronter ce dernier boss, symbolisant ainsi que mon aventure aura pris fin...
MAJ : J'ai fini tout le endgame et vraiment le jeu est extrêmement massif avec un endgame très bien pensé. 45H de pur bonheur.
Fa Ri Do La Si Ma Net
Do Ni Pwana Voo Ri Net
Pi Na So Mi Na Mi Set
Da Na Fun Su Looow Ban !