1984 est un livre terrifiant. C'est la première chose que je me suis dite lors de la lecture de l'appendice sur le novlangue. Parce que cela signifie que quelqu'un, quelque part dans le monde, a un jour eu l'idée d'appauvrir volontairement une langue, dans le but de conserver uniquement des termes ne permettant au locuteur d'exprimer qu'un seul mode de pensée. Et savoir qu'une personne est capable d'inventer une chose aussi effroyable, cela me fait froid dans le dos.
La première partie de l’œuvre introduit le personnage de Winston Smith. Le lecteur suit le quotidien de ce membre du Parti intérieur, mais ce n'est qu'un prétexte pour présenter ce qu'est devenu l'Angleterre (pardon, l'Océania) après une révolution survenue dans les années 50. Aujourd'hui, la société est écrasée par un état totalitaire, imposant une pensée unique tout en surveillant continuellement les habitants pour repérer et éliminer les éléments indésirables. La réflexion de George Orwell sur cette politique est véritablement frappante. L'auteur a réfléchi au mode de fonctionnement du Parti dans ses moindres détails (au niveau social, économique...) mais en plus il prend le temps d'aborder des problèmes de son époque, tels que les armes nucléaires ou l'industrialisation de la société. En lisant, je sentais que j'étais face à quelque chose d'intelligent et c'était absolument fascinant.
Il n'est jamais dit explicitement dans le livre ce qu'il s'est passé après la Seconde Guerre Mondiale. Le lecteur est laissé dans le doute, et les souvenirs flous du héros ne seront pas d'un grand secours. Orwell a bien compris qu'il est beaucoup plus marquant de laisser entendre qu'un régime totalitaire peut se mettre en place comme cela, sans prévenir... C'est peut-être aussi pour cela qu'il emploie des descriptions froides, détachées de toute émotion, comme tous les habitants de l'Océania.
Il me semble important de dire qu'avant de lire 1984, je savais ce qu'était le totalitarisme, mais je n'avais pas compris ce que c'était. Je pense que cela vient du fait que l'on s'attache à un seul personnage. Ce choix m'a un peu agacé dans la seconde partie, lors de la rencontre avec... qui n'est pas très bien amenée et qui est assez lourde. Heureusement le récit reprend du poil de la bête dans la dernière partie, la plus angoissante mais aussi la plus réussie.
1984 est donc une œuvre mémorable, dépeignant un futur alarmant dont quelques éléments font écho à notre propre société. Mais ce livre témoigne avant tout d'un malaise, un malaise originaire d'une époque trouble, où on n'osait pas regarder le passé et où on peinait à envisager le futur.