Antigone
7.4
Antigone

livre de Jean Anouilh (1944)

Je ne suis pas un étudiant en philo, ni même en lettre, juste un personnage qui apprécie la littérature et la philosophie. Je vous avoue qu'il m'est difficile de noter certaines oeuvres ; cette dérangeante impression de passer à côté du propos de l'auteur cogne continuellement dans mes pensées.

Lorsque je me suis saisi d'Antigone, le livre était déjà bien annoté. c'est donc quelque peu guidé que j'ai traversé ses lignes. Néanmoins, je me suis appliqué à lire la version de Sophocle avant. Jolie claque ! La version de Anouilh, lue dans la même journée, a un petit goût de restes qui auraient demeuré quelque 1500 ans dans le fond du frigo.

Pour commencer simple, il faut toucher à la forme. Anouilh ajoute des personnages inutiles, voire même nocifs au récit. La nourrice dans le premier cas, par ses incessants encanaillements ne servant qu'à présenter la résignation d'Antigone, les gardes, dans le second cas, tentant de plonger des gouttes d'humour dans le lac glacé de la tragédie, et qui agissent ainsi comme de l'huile dans de l'eau. Le résultat est qu'Antigone prend plus de temps à nous paraître antipathique, ce qui ne servira pas le reste du récit.

Toujours sur la forme, la version de Sophocle était claire et concise. Il n'y a qu'à voir ces duels question / réponses entre Créon et Antigone, puis Hémon, puis le devin, représentant (selon moi) le discours moral, puis politique / concret, et enfin religieux. Ici, Antigone fait la conne et Créon se crève le citron à trouver un moyen de discuter avec. Certes, Anouilh nous offre quand même son lot de réflexions, axant son approche de l'angle de la révolte et de l'absurde. Mais pourquoi s'étendre dans l'abstrait de la sorte ?

Car la petite Antigone se révolte. Elle dit non (et insiste bien là dessus) à un événement qui ne peut la mener qu'à la mort. D'ailleurs, je peine à suivre le fil de ses idées lorsqu'elle nous dit aimer la vie en début d'ouvrage, affirmer qu'elle peut dire non à tout ce qu'elle veut en milieu, et accepter fatalement la mort du début à la fin. Si quelqu'un a un éclaircissement là dessus, je suis preneur.

Au final, le gros problème que m'a posé ce livre, c'est l'image d'adolescente suicidaire qui ombrage tout au long Antigone, faisant d'elle un personnage détestable. Il y a à ce niveau une différence immense avec l'oeuvre d'origine : dans la version de Sophocle, Antigone veut enterrer son frère : c'est un but qui la conduit finalement à la mort. Ici, Antigone veut seulement mourir. L'original menait à la mort par l'acte. Dans cette version, c'est la mort qui pousse à l'acte. Une dynamique du personnage bien différente et que j'ai peiné à comprendre tout au long de l'histoire ; d'autant plus lorsqu'en conclusion, Antigone nous avoue elle-même ne plus trop savoir pourquoi elle meurt.
LeCactus
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le 27 juil. 2014

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