Relecture du couple, de la norme, de l’héritage — mais aussi un chant de la liberté retrouvée.

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L’air — doux, comme un voile sur les souvenirs perdus — effleure la peau de cette femme qui scrute, dans l’ombre d’un ancêtre et au cœur d’un mariage devenu énigme, sa propre lumière. Elle marche entre images floues et photo ancienne ; la narratrice — dont le prénom se dissout dans le récit — traque l’ombre de l’aïeul, Edmond, quand Vincent lui avoue un jour être amoureux d’un autre corps. La caméra intérieure se pose sur le geste lent de tourner la page d’un album, de scruter un regard figé, de sentir le souffle du temps glisser sur une fenêtre ouverte. Oui, c’est un roman d’émancipation — mais surtout un opéra intime de la reconquête de soi.


La structure alterne un plan-large vers le passé (l’ancêtre évanoui, la famille qui tourne le dos) et un gros-plan sensoriel sur le présent (le salon, les silences, le canapé devenu espace d’attente). Le montage est en surimpression : entre ce qui fut tu et ce qui se tait encore. Le bruit du vent dans les feuilles tombées fait écho aux phrases murmurées que la narratrice s’adresse à elle-même. Le cadre serré des souvenirs se dilate ensuite dans les paysages de Liège, Bruxelles, mémoire d’un exil intérieur.


L’écriture de Caroline Lamarche capte la texture du regret — peau, lumière, poussière — tout en occupant le vide laissé par l’autre homme. Elle ne se pose pas en victime mais en exploratrice. Pourtant, certains diront que l’émotion reste trop contenue, que la sensation ne s’attarde pas assez. Et pourtant, dans ce lent frôlement, c’est toute une vie qui murmure.


Le thème de l’amour contrarié — non seulement pour le mari homosexuel mais aussi pour l’ancêtre effacé — transite vers la solitude et la réparation. On pense à la voix de Sartre qui, dans La Nausée, interroge l’existence, à celle de Conrad qui explore les non-dits. Ici la narratrice interroge son regard, son corps, sa place — mais aussi la place des absents. Le « bel obscur » est cette figure ambiguë, à la fois attirante et repoussée, miroir de l’invisible.


Oui, c’est une relecture du couple, de la norme, de l’héritage — mais c’est aussi un chant de la liberté retrouvée. Une femme se redresse, non par revanche, mais par jeu, par curiosité, par fantaisie. Ma note : 14 / 20


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Le-General
7
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le 7 nov. 2025

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Le-Général

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