Je crois que la détestation des hommes nous ouvre les portes de l’amour pour les femmes (et pour nous-mêmes) sous toutes les formes que cela peut prendre. Et qu’on a besoin de cet amour – de cette sororité – pour nous libérer.
Un livre très court (moins de 80 pages) aux grandes promesses : celle de réhabiliter la misandrie, ou ce « sentiment négatif à l’égard de la gent masculine dans son ensemble » (p.19), comme un acte féministe puissant et légitime, comme une réaction tout à fait juste face à la condition de la femme dans la société patriarcale, et enfin comme une « méthode » destinée à reconnecter les femmes à elles-mêmes et à leurs sœurs.
Chapitres.
I. Misandrie, nom féminin.
II. Maquée avec un mec.
III. Misandres hystériques et mal-baisées.
IV. Les hommes qui n’aiment pas les femmes.
V. Que rugisse la colère des femmes.
VI. Médiocre comme un homme.
VII. Le piège de l’hétérosexualité.
VIII. Sœurs.
IX. Éloge des réunions Tupperware, des soirées pyjama et de nos girls’clubs.
Chaque chapitre faisant tout au plus 8 pages, vous devinez aisément où réside le problème principal de cet ouvrage : les développements sont trop courts, trop superficiels, trop vagues, comme écrits à la « va-vite » pour exprimer un sentiment de révolte personnel plutôt que pour être un véritable contenu abouti, révolutionnaire, influent.
Moins d’une dizaine de pages, deux petits chapitres pour aborder la sororité : autant dire que ça m’a franchement froissée. Le livre supposé promouvoir le rejet des hommes passe le plus clair de son temps à parler d’eux et de leur impact sur la société, les femmes. Si je comprends bien en quoi il est nécessaire de mettre en lumière ceci pour traiter de la condition des femmes, je regrette simplement que l’autrice ne se soit pas pleinement engagée à des développements profonds sur ce que peut réussir à être la femme lorsque sa misandrie a « abouti », lorsque la femme parvient enfin à vivre sans penser constamment à l’homme. Il est clair que la misandrie mise en avant dans ce livre demeure TRÈS TRÈS légère.
C’est plutôt « Regardez les hommes, ces connards privilégiés qui font du mal à tout le monde et osez les détester ouvertement ».
Bien, mais il n’y a dans ça aucun véritable appel à la révolution, aucune surprise, aucun bouleversement.
Les pistes sont cependant intéressantes, dans la mesure où les anecdotes, et les courts développements sont à même de résonner avec l’expérience de toutes les femmes. J’ai été plusieurs fois très touchée par ce livre, je ne le nierais pas. Il me donnait constamment envie de pleurer, car la difficulté d’être femme, dans une société patriarcale virant de plus en plus vers le masculinisme, y est très bien racontée.
Faire face à l’humiliation, à l’absence de reconnaissance de la part d’une société qui considère le labeur et la charge mentale des femmes comme insignifiants. Devoir se faire au risque bien réel de pouvoir être violentée ou même tuée par son partenaire, d’être harcelée dans la rue à tout moment par des hommes malveillants. Considérée comme moins que rien car la voix d’une femme est rarement perçue comme puissante et ferme.
Se faire avoir par une image de la femme toute faite, qui nous cantonne à prendre excessivement soin de son physique, à ne pas crier, à ne jamais être vulgaire, ne jamais faillir.
En nous rappelant à tout ça, Harmange et son propos m’ont beaucoup émue.
Conclusion :
Un livre qui ouvre des pistes de réflexions pertinentes, que nous avons alors la tâche de mener à bien nous-mêmes. Considérez ce livre comme une introduction, comme une opportunité de penser la posture misandre comme quelque chose de plus profond que ce que l’on peut en dire, quelque chose de légitime malgré les nombreuses tentatives de « décrédibilisation » (par les hommes surtout) à l’encontre de cet acte et de sa portée féministe.