Well back, Michel ! Le retour de Houellebecq est considéré comme un événement qui dépasse de loin son caractère littéraire. N'est ce pas un peu exagéré ? Ecrivain, oui, sociologue, un peu, prophète, et puis quoi encore ? Ceci dit, les romans français de la rentrée de l'automne dernier n'avaient vraiment pas de quoi susciter l'enthousiasme (oh, cette envie de citer quelques noms) et il est normal de faire bon accueil à un auteur qui a déjà prouvé, malgré les controverses, qu'il était une valeur sûre, et surtout pas un romancier tiède et consensuel. Il n'y a pas trop de surprises dans la lecture de Sérotonine, à vrai dire, mais on s'y attendait, sachant que notre homme semble de plus en plus misanthrope (misogyne ?) et asocial bien que curieux de notre monde, de ses habitants et de ce qui les meut. Cependant, on n'est pas déçu du voyage, une fois de plus entre Paris et la Normandie, notamment, de la solitude moderne des villes à la déréliction des campagnes. Et puis, il ne faut pas croire, mais Houellebecq est un écrivain qui se documente et pas que sur wikipédia : ses pages sur l'agriculture, les quotas laitiers et, de façon anecdotique, sur la ville de Niort ou les bouquets sportifs d'une certaine box, sonnent le vécu et l'approfondi. Quant au personnage principal de Sérotonine, qui ressemble à Houellebecq en un peu plus jeune (mais ça, c'est le lecteur qui le pense et ce n'est pas prouvé), il est bien évidemment désabusé, déphasé, déprimé, et semble se diriger d'un pas lourd vers la fin. C'est sinistre ? Oui, un peu, mais pas tellement finalement tant le romancier est doué d'un humour ravageur qui d'ailleurs frappe souvent juste, entre le cynisme et l'ironie bienveillante (plus souvent le premier, on est d'accord). Au fond, même s'il brasse plusieurs thématiques, parfois de manière un peu brouillonne, le livre raconte la fin du désir pour son personnage principal, soit donc la cessation de toute raison d'exister. Et Houellebecq en profite pour épingler une époque qui est tout sauf excitante, de plus en plus normative et réglementée sans oublier d'être morale et politiquement correcte, bref tout ce que notre homme exècre. Sérotonine est assez inégal mais facile à lire, à part quelques scènes vraiment dérangeantes (le pédophile) et des obsessions à caractère pornographique qui lassent à la longue par leur répétition, faussement provocatrices et surtout puériles, comme si certains mots crus pouvaient encore choquer dans la littérature.

Cinephile-doux
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le 8 janv. 2019

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