The Walking Dead
6.6
The Walking Dead

Série AMC (2010)

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Saison 1


Grand fan devant l'Eternel de l'oeuvre de Kirkman, j'ai suivi avec attention les critiques de cette adaptation avant de pouvoir juger par moi-même. Finalement, cette série n'est ni le chef-d'oeuvre escompté ni le foirage honteux qui est parfois mis en avant sur le Net. Son plus grand défaut, pour moi ? Son hétérogénéité.


On commence avec un premier épisode proche de la perfection. Fidèle au comics, le pilote est plein de tensions, de silences et de mélancolie. On se retrouve en pleine horreur intimiste, profondément marquante et post-apocalyptique. L'un des personnages de la BD se retrouve même enrichi et propose déjà une magnifique variation par rapport à l'original, bref, précisément ce que l'on est en droit d'attendre d'une adaptation. L'inédit se poursuit, de manière beaucoup plus brutale, dans le second épisode. Cette fois, on est dans le registre de l'horreur démonstrative, barbare, fun. Un épisode particulièrement défoulant qui fait pleinement partie de l'expérience Walking Dead. Malheureusement, les premiers défauts apparaissent aussi, pour ne plus disparaitre par la suite.


Ajouter de l'inédit, c'est cool disais-je. J'accueillais donc avec joie l'idée de découvrir de nouveaux personnages. Sauf que ces derniers sont particulièrement mal écrits: commençons avec les frères redneck fascistes. Celui qui apparaît dans le deuxième épisode, Merle, parvient à sortir tous les clichés racistes/misogynes/psychopathiques dans les dix premières minutes de son apparition. Je crois que j'aurais pu écrire moi-même ses dialogues sur un dessous de verre en carton, une nuit de beuverie, entre deux rails de coke. Passons.


Le mari violent de Carol. Non, je spoile rien du tout puisque, en gros, ce type fout une raclée à sa femme dès son premier vrai dialogue ! Parce que dans cette série, voyez-vous, on n'a pas de temps à perdre pour instaurer la psychologie des personnages. Si la fiche de l'un d'entre eux indique "violent avec sa femme" alors il faut tout de suite mettre un gros dégueulasse complètement débile, limite avec la panse qui dépasse du T-shirt et une canette de bière à la main, et qui crie sur les femmes quand la lessive ne va pas assez vite à son goût... Quelle subtilité ! Quelle délicatesse scénaristique ! D'autant plus incompréhensible que la série, qui n'adapte que le premier tome des comics, avait largement le temps de développer le côté intimiste qu'on retrouve dans le pilote. Au lieu de ça, on a des va-et-vient intempestifs entre les deux endroits principaux de la série émaillés, il est vrai, de jolis combats avec les zombies les plus crédibles qu'il m'ait été donné de voir (à quelques exceptions près...). Mais le tout est trop décousu, trop délité pour tenir longtemps la route.


Le pire, c'est quand j'ai appris que Kirkman en personne avait scénarisé l'un des épisodes ! Vous dire que j'attendais avec impatience le scénario du bonhomme est un euphémisme... et je me retrouve avec le passage le plus foiré de toute cette saison 1 ! J'ai encore du mal à y croire. Pour ne rien vous dévoiler, je dirais juste qu'il s'agit d'une séquence bisounours qui n'a rien à voir avec l'esprit Walking Dead. Kirkman arrive toujours, dans ses scénars, à offrir des situations complexes loin de tout manichéisme. On dirait qu'il a tellement voulu appuyer cette particularité que, cette fois-ci, il est parvenu à s'auto-caricaturer. En bref, même le créateur de cet univers ne parvient pas à relever le niveau de la trame générale.


Et pourtant... j'ai beaucoup aimé l'ultime épisode, celui sur lequel tout le monde crache en lui reprochant son côté "explosif". Il s'agit malgré tout, selon moi, de l'épisode le plus intimiste depuis le pilote. Pendant un moment, les protagonistes se sentent enfin en sécurité et se lachent, se dévoilent. C'est le moment où l'on est le plus proche d'eux. Le désemparement de Shane... l'affection de Dale... et Rick, enfin ! LE Rick du comics, qui finit par avouer ses doutes, ses peurs, ses faiblesses. Oui, décidément, le final m'a touché et me laisse espérer du meilleur pour la suite.


Il y a d'autres moments de grâce dans la série. Deux agonies en particulier, dont les mises en scène surpassent, à mon sens, celles du comics. Les scénaristes sont donc bel et bien capables d'offrir des variations intéressantes et approfondies sur cet univers de désespoir. Leur idée la plus ambitieuse: garder en vie un personnage qui devait disparaître. Un personnage que j'apprécie énormément en plus et qui préfigure de possibles futures scènes d'anthologie. Alors, en fin de compte, je dis oui. Oui à une saison avec plus d'épisodes (de 6 on passera à 13 l'année prochaine) qui montrera enfin le plein potentiel de cette adaptation.


Saison 2


Encore une saison entière consacrée à un seul tome du comic. Ce qui est manifestement une erreur au vu des graves problèmes de rythme que cela impose: ça s'empâte, ça tourne en rond, ça laisse plus de temps pour prendre des décisions stupides qui décrédibilisent quelque peu l'équipe de "héros". Heureusement, il y a Shane. Oui, le garder en vie pour tenter une expérience différente de l'oeuvre originale était une excellente idée. Surtout que l'acteur est bon, du genre à surclasser tous les autres avec maestra. Mieux écrit aussi, Shane semble être le seul personnage capable d'insuffler une véritable tension dans un groupe perdu dans ses tergiversations stériles. Il est cependant suivi de près par Daryl, meilleure création de cette adaptation, à la fois badass et psychologiquement plus subtil qu'il n'y parait. Son évolution depuis la caricature de redneck dans la saison 1, je ne m'y attendais tout simplement pas, bien joué. Quoi qu'il en soit, en règle générale, le changement de destinée de certains personnages choque les fans du comic dans le bon sens du terme: à l'instar du cas Shane, cela nous permet de prendre de nouvelles lignes narratives parrallèles à la BD et de continuer à nous surprendre.


C'est dingue aussi comme de longues minutes de bondieuseries très mal insérées dans l'histoire (tout le monde prie soudainement Dieu dans un épisode alors qu'on n'en parlait jamais et qu'on en reparlera plus jamais) sont largement compensées (et pardonnées) par un moment de grâce (l'apparition de la biche, dont les conséquences vont tour à tour desespérer Rick et lui redonner foi en l'avenir). L'épisode final, grandiose, relance plus que jamais mon intérêt pour une troisième saison qui établira définitivement le potentiel de la série au vu de l'importance des évènements qui vont s'y dérouler...


Saison 3


Et bien le constat n'est pas vraiment flatteur. Cette saison est la pire de toutes. Il est maintenant évident que j'avais raison, à l'époque, quand je clamais que certains des passages les plus marquants dans le comics ne pourraient jamais être correctement retranscrits dans la série. En fait, tout l'arc avec le Gouverneur, qui est un peu le sommet du comics jusqu'à présent, a été édulcoré, censuré, affadi - appelez ça comme vous voudrez. Tension psychologique au plus bas, scènes de dialogues insipides jusqu'à plus soif, comportements incohérents. Le Gouverneur a l'air d'une pauvre copie sans éclat de l'original, ça fait pitié. C'est mou, c'est mou, c'est incroyable comme c'est chiant.


Heureusement qu'il y a les zombies, magnifiques. Et les passages d'action contre ces bestioles ou contre les humains sont toujours aussi bien torchés. Mais bon, en être réduit à apprécier ça dans un univers post-apocalyptique aussi profond que Walking Dead, c'est un peu la loose. In extremis, de bonnes surprises qui tiennent éveillés. Allez ouais, ça reste franchement regardable quand même. Faut juste que j'arrête d'espérer rejoindre le niveau de qualité de l'original, c'est tout. En zombie grand public, ça reste quand même largement au dessus d'un World War Z version film... Et le niveau technique de cette série, de haute volée, me fait parfois justement oublier que c'est de la télé, pas du cinéma. Respect au moins pour cette constance-là.


Saison 4


Alors là... je suis agréablement surpris. Même franchement épaté je dois dire. Ils y sont finalement arrivé: le niveau de violence et de tension psychologique a pratiquement rejoint le comics. Des scènes très dures, clairement pas destinées au grand public lambda, ont fait leur apparition. Et comme dans le comics, elles ne sont pas là juste pour le plaisir de choquer mais surtout pour interroger le spectateur sur les limites à dépasser (ou pas) pour survivre. En fait, la série vient tout simplement de faire un bond de maturité auquel je ne m'attendais pas. Les meilleurs moments que j'aurais voulu voir... et bien je les ai eu. Attention, le rythme est toujours aussi lent, mais ce n'est plus un problème pour moi, parce que les personnages sont enfin profondément fouillés psychologiquement. Je ne me suis pas ennuyé une seconde, trop occupé à suivre les tourments des survivants, exposés dans des dialogues de mieux en mieux écrits.


Le changement de showrunner (le scénariste en chef, en gros) a payé. La censure stupide des précédentes saisons semble miraculeusement levée. De plus, le nombre de morts n'est pas aussi exagéré que dans le comics, ce qui promet encore une pelletée de personnages intéressants pour la prochaine saison (ce que le comics n'est plus à même de fournir pour l'instant) qu'il me tarde vraiment de voir. En priant pour que cette ligne scénaristique à la fois plus fine et plus couillue soit préservée...

Amrit
7
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le 23 juil. 2011

Modifiée

le 1 août 2014

Critique lue 5.8K fois

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Amrit

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