Le culte de la réaction

À quoi bon l’esthétisation outrancière à grand renfort de split screens, de demi-bonnettes, de plans désaxés, de décors minimalistes, si elle ne se subordonne pas à une mise en scène ? si sa seule finalité est d’occuper le spectateur entre deux scènes de boucherie ? Avec ce Retour – et déjà avec La Malédiction, le précédent volet –, Chucky cesse d’être une saga horrifique teintée de comique pour tomber dans le grand-guignolesque sordide qui investit le cinéma comme un support marketing écoulé directement en vidéo.

L’épouvante n’est pas pensée, le suspense n’est pas travaillé, les acteurs ne sont pas dirigés, si bien que nous assistons à une succession d’images choc composées uniquement pour nous faire réagir et sursauter, pour nous écœurer. Le film de Don Mancini est l’incarnation de cette société de la réaction dans laquelle nous vivons aujourd’hui, une société des émotions faciles et exagérées qui révèlent, en creux, l’artificialité des relations humaines : les personnages se débattent telles des poupées, et ainsi privés de profondeur, ils n’ont aucun mal à rompre avec leur caractérisation initiale pour renaître, muter, se transformer à l’infini suivant une logique du caméléon qui nie aussitôt leur intériorité. Un sourire menaçant, une paire d’yeux écarquillés, le tour est joué. Le making-of confirme la chose : acteurs et techniciens annoncent devant la caméra le meurtre qu’ils préfèrent !

C’est du chic pour du choc, de la dégueulasserie sans art, un reflet aseptisé de cinéma. Tom Holland, le cinéaste et réalisateur de Jeu d’Enfant, semble bien loin…