Dalloway est un film passionnant car son scénario est construit en arborescence. L’écrivaine (que Cécile de France interprète avec maestria entre doutes, angoisses et paranoïa grandissante) d’abord satisfaite d’être intégrée à une résidence d’artistes hyper connectée, va peu à peu découvrir l’envers de ce cocon artistique. Le film raconte un avenir proche, potentiel et glaçant pour l’intelligence artificielle qui risque de prendre beaucoup plus de place chez des individus ouverts et trop confiants. Yann Gozlan fait monter crescendo le malaise et rivalise avec des dystopies américaines grâce à des actrices bien choisies à l’image d’Anna Mouglalis ( directrice de résidence artistique au passé louche) ou Myléne Farmer ( prêtant uniquement sa voix à Dalloway, l’assistante virtuelle de l’écrivaine, entre intentions et au service de la propre logique de sa finalité cybernétique). Comme la protagoniste principale, le spectateur est en immersion progressive dans un environnement devenant hostile, et il faut aussi accepter cette position inconfortable tout au long du film n’offrant plus vraiment de répit jusqu’à un final prévisible car l’écrivaine se sent dépossédée de sa propre âme et donc de sa propre légitimité existentielle ( celle d’écrire et de produire une littérature qui lui est propre et « normalement » infalsifiable). Là où le film a raison d’alerter est de ne jamais parler de sa vie personnelle à une intelligence artificielle et de l’utiliser comme un outil discipliné et utilitaire. Même si cet état de l’IA n’est pas avenu, il pourrait le devenir car la volonté de l’homme à la faire évoluer est préoccupante.Voila pourquoi Dalloway est essentiel au même titre que la franchise des Terminator et réussit aussi à superposer également une destinée personnelle face à une destinée commune envisageable et pas franchement réjouissante. D’ici là, garder votre personnalité, vos données personnelles sous contrôle et cela devrait théoriquement bien se passer même si le pire n’est jamais certain.