Dracula
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Dracula

Film de Luc Besson (2025)

Peut-on aimer une seule femme pendant 400 ans?

Peut-on attendre l'amour pendent 400 ans? Depuis la naissance du cinéma, il y en a eu des vampires. Du Nosferatu de Friedrich Murnau (1922) au Dracula de Francis Ford Coppola (1992), de Bela Lugosi dans Dracula de Tod Browning (1931) à Christopher Lee, de Klaus Kinski en Nosferatu, le fantôme de la nuit de Werner Herzog (1979) à Keanu Reeves dont on attend The Dark World (2025)... Combien d'acteurs se sont allongés dans les cercueils du comte de Transylvanie? Luc Besson et son acteur Caleb Landry Jones parlaient à bâtons rompus, lors du tournage de Dogman (2023). C'est de cette conversation qu'est sortie l'idée de filmer l'acteur dans le rôle du Prince aristocrate. L'histoire tirée de l'oeuvre de l'écrivain irlandais (Abraham) Bram Stoker, publiée en 1897, est une histoire d'amour romantique dans un chateau gothique. Autant confier la musique à Dany Elfman, le cerveau musical des films de Tim Burton. Pour le romantisme, l'équipe va associer l'homme fort, courageux, sanguinaire et dominateur en armure, se battant avec rage contre les Sarrazins, en 1489, puis le prince délicat en redingote et haut de forme, animé des meilleures intentions pour séduire sa belle, en 1889.

Pour l'amour, on peut faire confiance à Luc Besson qui en connait un rayon. Il sait filmer la femme avec amour et nous rendre amoureux de ses actrices. Lui-même les épouse parfois. On se retrouve dans le chateau des Carpathes, une illustration de Druillet devenue réalité, dans un paysage froid, gris et enneigé. Je suis d'autant plus ravi de cette référence que lorsque j'ai rencontré Francis Ford Coppola, à Cannes, et que je lui parlais de son Dracula, J'étais surpris qu'il connaisse bien Moebius mais pas de tout Philippe Druillet. Je lui avais fait découvrir notre talent français qui avait illustré les péripéties du comte Dracula dès 1968, puis à de nombreuses reprises dans le magazine Métal Hurlant, la machine à rêver. Dracula est un séducteur. Oublié Nosferatu, son crâne chauve, ses oreilles pointues et sa silhouette rachitique. Caleb Landry Jones joue parfaitement le séducteur, 400 ans de bonnes manières, de voyages, de danses raffinées dans les plus beaux châteaux d'Europe. L'amour va être séparé par la guerre, par la cruauté, par l'absence de protection de Dieu. Pourquoi tous les peuples se font- ils la guerre au nom de leur Dieu? Ce sont des dieux différents ou quoi?

Une enquête va être entreprise, 400 ans plus tard en 1889 par un prêtre qui refuse de se laisser appeler Van Helsing, le chasseur de Vampires (Christoph Waltz) et un medecin (Guillaume de Tonquédec, méconnaissance dans son plus beau rôle). Et bien sûr il y a les femmes. Deux en particulier: Matilda De Angelis dans les role de Maria la possédée (admirable, folle et mémorable) puis la bourgeoise libérée (enjouée, espiègle et attirante). Et bien sûr Zoé Sidel (Zoé Bleu dans le générique, en référence au film le Grand Bleu, car elle est la fille de Rosanna Arquette). Zoe Sidel, 30 ans, joue l'amoureuse puis la réincarnation aimée, l'amour passion, la séduction, l'élégance, la femme réservée comme la femme libre d'amour. Parce qu'on est folle, passionnée, joueuse, insatiable lorsqu'on aime et qu'on a vingt ans. Ce que je n'ai pas aimé, c'est la mort de la femme aimée qui arrive trip tôt et est téléphonée, tellement ça parait peu crédible pour la femme d'un Prince commandant en guerre de la laisser partir sous la maigre escorte de quatre chats. J'ai surtout détesté les créatures démoniaques, sortes de serviteurs du Prince de la Nuit. On les croirait rescapées du film Valerian où justement elles avaient contribué, à mon sens, à l' échec commercial du film. Car trop peu crédibles. Ce que j'ai adoré. Dans la première partie du film, on assiste à des combats épiques, dignes d'une fresque historique à l'américaine. Avec une scène choc faisant surgir des soldats au sommet d'une colline en feu. Déjà visible dans la bande-annonce. Les scènes d'amour passion dans le château sont destinées à imprimer nos rétines, J'ai aimé l'apparition du prince de 400 ans avec un Look gothique punk asiatique, du style qui n'a jamais été chez le coiffeur. Les références au cinéma expressionniste allemand des années 1920 et 1930, notamment avec l'arrivée du jeune notaire dans la cour immense et vide du château, sont autant d'images fortes qui resteront. Avec les vues en plongée, on s'apitoie déjà sur une victime toute désignée. On se doute du sort qui l'attend. Mais celle qui va nous passionner, c'est sa fiancée +Zoé Bleu), ainsi que le jeu de séduction du Prince des Ténèbres. Il sera de prêt à tout pour reconquérir sa promise. Les séquences de danse à la cour anisi que dans le château de Versailles nous permettent de fantasmer sur la fascination de tous les mecs de tomber sur un parfum, plus fort que Axe pour Hommes, capable de faire tourner les têtes des précieuses ridicules. Elles perdent d'abord leurs perruques volumineuses avant d'abandonner jusqu'à leur âme. La scène dans le couvent de jeunes filles ressemble à un tableau encore plus puissant que le Radeau de la Méduse. Reste notre bel acteur en redingote et haut de forme. Quelle femme ne se laisserait pas séduire? Ça change des « Wesh ! » et des « Mademoiselle, vous êtes charmante ! » À mes yeux, cette version de Dracula fera partie des grands films de Luc Besson. Qui est déjà le plus grand réalisateur et producteur français.



AlainZirah
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le 22 août 2025

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Alain Zirah

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