Le documentaire Norman Foster (2012), réalisé par Carlos Carcas et Norberto López Amado, se propose de retracer la carrière exceptionnelle de l’architecte britannique à travers une série de témoignages, d’archives et de mises en images de ses œuvres. S’il parvient indéniablement à rendre compte de l’ampleur de son influence sur l’architecture contemporaine, le film peine cependant à dépasser la forme de l’hommage univoque. Cette approche, bien qu’honnête et esthétiquement soignée, limite considérablement la portée critique et émotionnelle du propos. D’où une impression d’ensemble mitigée, que reflète ma note de 5.5/10.
L’une des principales qualités du documentaire réside dans sa mise en scène visuelle. Le soin apporté à la photographie, aux mouvements de caméra et à la bande-son crée une atmosphère contemplative, presque méditative. Chaque projet est présenté avec une attention particulière au détail et à la mise en valeur des lignes architecturales. Le spectateur se trouve ainsi immergé dans l’univers formel et technologique de Foster, dont les œuvres emblématiques — du viaduc de Millau à la coupole du Reichstag — sont mises en lumière avec rigueur.
Cependant, cette esthétique très contrôlée tend à uniformiser le récit, jusqu’à en atténuer la dimension humaine. Si Foster apparaît comme une figure inspirante, son parcours est présenté de manière très linéaire, sans véritable mise en tension narrative. Peu d’éléments viennent questionner, nuancer ou approfondir la complexité de son œuvre ou de sa personnalité. Le film évite soigneusement toute controverse ou interrogation critique, ce qui affaiblit son potentiel analytique.
Par ailleurs, l’analyse des projets est souvent traitée de manière descriptive, au détriment d’une véritable contextualisation sociale, politique ou environnementale. Le rapport entre architecture et société, pourtant fondamental dans la réflexion contemporaine, n’est qu’effleuré. Ce manque d’approfondissement peut laisser le spectateur sur sa faim, d’autant plus que les thématiques abordées (durabilité, innovation, rapport au passé) mériteraient une approche plus argumentative.
Cela étant dit, le documentaire remplit partiellement ses objectifs : il offre un panorama clair et accessible de la carrière de Norman Foster, et peut constituer une porte d’entrée efficace pour les néophytes. Le ton reste toujours respectueux, et l’admiration portée au sujet est palpable. Mais cette admiration, lorsqu’elle n’est pas accompagnée d’un regard critique, tend à limiter l’intérêt de l’œuvre sur le plan intellectuel.
En conclusion, Norman Foster est un documentaire soigné, esthétiquement séduisant, mais qui manque d’audace dans son traitement. Il s’agit d’un hommage visuel plaisant, certes, mais qui échoue à véritablement interroger l’homme et l’architecte dans toute sa complexité. Une œuvre qui laisse une impression d’inachevé, et qui aurait gagné à assumer un point de vue plus critique et plus engagé.