The Running Man n’est composé, pour l’essentiel, que de plans rapprochés captant la tension du protagoniste engagé dans une fuite, la bravoure des personnes qui lui viennent en aide, la cruauté des organisateurs du jeu télévisé : visiblement sous influence vidéoludique, Edgar Wright nous confine en compagnie de Ben Richards, brave gars dont l’insubordination initiale annonce un destin à retombée collective et symbolique. Dès lors, deux films tentent de cohabiter : le premier, réussi, retranscrit avec énergie la lutte d’un homme pour rester en vie dans une société sous surveillance où le divertissement, entendu comme industrie, dévoile ses coulisses ensanglantées ; le deuxième, similaire à la trajectoire d’un Arthur Fleck dans Joker (Todd Phillips, 2019), s’efforce de convertir le héros en martyr d’une cause qui le dépasse, à savoir la reconquête farouche d’une liberté qu’une Amérique totalitaire a volée à ses citoyens, lui substituant panem et circenses. Le souci, c’est que cet axe politique et allégorique ne sait comment advenir et emprunte divers chemins de traverse tous plus farfelus et invraisemblables les uns que les autres.
Surtout, le long métrage ne sait comment revenir sur son statut même d’œuvre visuelle qui, par sa mise en scène, participe au spectacle qu’il entend dénoncer… Les images retranscrites sont principalement les siennes – exception faite des retouches par intelligence artificielle – et ne parviennent pas à déconstruire jusqu’au bout cette masculinité triomphante qui, par la nécessité d’un héroïsme stéréotypé, revient à la charge : le second degré est délégué à d’inutiles personnages secondaires, et c’est alors un schéma tout tracé que le film finit par retrouver, sans surprises ni subtilité. The Running Man s’est perdu en route, et nous a perdus avec lui. Dommage.