Ce nouveau Superman constitue une véritable surprise. On le sait, parmi la multitude de blockbusters produits chaque année, certains parviennent encore à conjuguer spectacle, émotion et intérêt narratif. Celui-ci en est un exemple probant. On sent un vent de renouveau souffler sur l’univers du personnage, et cela apporte un bienvenu regain d’enthousiasme. Après la lourdeur et les maladresses de Man of Steel, on retrouve enfin le plaisir de voir Superman à l’écran – un héros pourtant souvent jugé trop lisse et trop invincible pour susciter une réelle empathie.
Dès les premières minutes, le film capte l’attention. Pas de prologue interminable : le spectateur est directement plongé dans l’intrigue, et la clarté du récit permet de tout saisir sans effort. Cette efficacité narrative est d’autant plus appréciable qu’elle sert à introduire une situation rare et audacieuse : la première véritable défaite de Superman. On s’éloigne ainsi de la routine de son invincibilité, souvent à l’origine d’une certaine monotonie dans ses aventures.
Le personnage gagne en humanité. Son rapport complexe avec Lois Lane – fait de tensions sentimentales et de difficultés de vie commune – ajoute une dimension personnelle crédible. Ses interactions avec les populations qu’il protège, qu’il s’agisse de Metropolis ou de nations fictives, révèlent une vulnérabilité émotionnelle inhabituelle. Dès le début, sa défaite le place dans une posture où il ne se contente plus de combattre « les méchants » par principe : il lutte avant tout pour sauver des vies. Ce Superman n’est plus une figure froide et impassible ; il devient un héros animé par une compassion tangible.
Sur le plan de l’action, le film se distingue de la majorité des productions super-héroïques actuelles. Les affrontements, bien présents, ne s’étirent pas inutilement et servent toujours le récit. On évite le surdosage d’effets tapageurs et de pathos forcé. Les émotions traversées par le spectateur sont variées mais dosées, et si le film ne brille pas par une subtilité extrême, il conserve une cohérence émotionnelle bienvenue.
L’humour, marque de fabrique de James Gunn, trouve ici sa place. Quelques répliques bien senties, dont une plaisante pique à Twitter, apportent de la légèreté sans détourner l’attention de l’histoire.
L’aspect politique, qui a beaucoup fait parler, mérite également d’être abordé. Certes, la métaphore est appuyée : un mélange d’échos au Moyen-Orient et à l’Europe de l’Est, volontairement identifiable. Cette absence de finesse peut surprendre, mais elle s’explique par un souci d’accessibilité : le propos sur l’impérialisme se veut compréhensible du plus grand nombre. Si ce message a le mérite d’exister, il ne constitue pas, selon moi, le point le plus marquant du film.
Les personnages secondaires apportent un relief appréciable : un Green Lantern drôle et attachant, un Mr. Terrific d’un calme presque déconcertant, un Lex Luthor convaincant et, surtout, un Superman revisité avec une aura plus positive que dans Man of Steel.
En conclusion, ce Superman réussit là où beaucoup échouent : proposer un divertissement accessible, rythmé et incarné, qui renouvelle une figure emblématique sans la trahir. Sans être un chef-d’œuvre de subtilité, il offre un récit clair, des émotions sincères et un héros enfin humain. Un blockbuster qui rappelle que le genre peut encore surprendre lorsqu’il est mené avec cœur et intelligence.