Satellite of Love

Support: 4K Bluray UltraHD

Soderbergh enchaîne les projets courts reposant sur des concepts simples mais menés au bout. Après Presence en février, c’est Black Bag qui suit en mars. Et derrière ses airs de thriller d’espionnage servi par un casting classieux et impeccable, c’est avant tout la peinture d’un univers qui semble intéresser le cinéaste.

Car derrière cette intrigue alambiquée d’agents doubles ou triples, de power trips qu’exercent conjoints et collègues sur leur supposés proches, c’est le portrait de névrosés obsessionnels qui éclate. Des personnages qui assument leur dysfonctionnement par rapport à la norme, et se plantent des poignards dans le dos tout en plaçant un sabot de face dans l’entrejambe, le tout en ayant conscience que les autres font de même avec eux. Ces hommes et femmes, isolés par des arrières plans floutés se retrouvent dans une bulle, un microcosme où chacun est constamment sous la loupe de l’autre, comme dans un vivarium coupé du monde extérieur.

Ils le savent, en jouissent, et en acclament leurs contradictions : "I hate liars" répète plusieurs fois Fassbender, dont mentir est le métier.

Dans ce jeu de massacre intellectuel et d’humiliation où la vie privée n’existe que par contrainte de la vie professionnelle, ces individus hors sol évoluent avec l’illusion de contrôler ce qu’ils donnent à voir aux autres (le fameux Black Bag du titre original). Mais c’est un jeu du chat et de la souris où il n’y aurait que des chats.

L’entrelacement des manigances, finalement secondaire dans le traitement de Soderbergh, finit par faire douter le spectateur encore plus que les personnages coincés au milieu de la tourmente. A moins que ceux-ci ne le soient pas réellement, et manipulent une partie truquée depuis ses prémices?

Redoutablement efficace, Black Bag continue de faire de son auteur un des cinéastes les plus hétéroclites de sa génération, toujours apte à se renouveler dans les genres.